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Seven Deadly Sins : le shonen fantasy old-school qui fracasse

Comme toute industrie, celle du manga shonen est cyclique et elle cherche actuellement un nouveau souffle. Alors que la fin du trimuvirat One Piece, Naruto et Bleach est actée depuis longtemps, un challenger postule pour une place sur le podium de la catégorie reine des mangas : la série Seven Deadly Sins.

Dans le monde impitoyable des shonen actuellement publiés, One Piece est un roi sans partage, que ce soit en terme de ventes ou de fans. Enfin, ce n'est pas tout à fait exact, le manga d'Eiichiro Oda est magnanime et a laissé en 2014 la place de shonen « événement » à L'Attaque des Titans, qui le tutoie en terme de ventes annuelles, mais pas en vente par tomes. C'est une erreur fréquemment commise par les nombreux « articles » publiés actuellement sur le web, les rédacteurs se basant uniquement sur des chiffres globaux. Avec une série récente, forcément, des milliers de nouveaux lecteurs achètent en un laps de temps très court l'ensemble des tomes publiés (moins nombreux que One Piece). Une fois cela acquis, qui peut prétendre à la 3ème place ?

Certains manants vont bien tenter de défendre leurs champions : Fairy Tail (qui lit encore ce truc ?), le disparu des radars Bleach, l'irrégulier Hunter x Hunter ou le mystérieux Jojo.... Il y a bien sûr régulièrement une nouvelle vague d'outsiders, en majorité venant du Weekly Shonen Jump (si on cherche le best-seller inconstestable). Toriko a de bonnes critiques mais ses ventes ne sont pas celles d'un cador. Assassination Classeroom est dans le top 5 des ventes au Japon, mais le buzz qu'il a généré n'a pas accouché sur une sucessmania comme ses concurrents. Il y a aussi Haikyu mais cette série reste prisonnière de son thème sportif. Quant à la nouvelle pépite My Hero Academia, il trop tôt pour en parler avec seulement 6 tomes publiés. On pense aussi et bien sûr à One-Punch Man, la sensation japonaise de l'année 2015. Lordo vous a déjà proposé un article bien avant l'annonce de la publication française et ce n'est pas mon favori. J'oserais bien jouer la carte The Heroic Legend of Arslan mais avec 4 tomes, cela reste encore un outsider. De toute façon, je ne vais pas faire la liste des tous les shonen qui se vendent bien (dont Detective Conan) car un seul m'intéresse réellement aujourd'hui : Seven Deadly Sins.

SAUVER LA PRINCESSE ET LE ROYAUME

Le nom japonais du manga est Nanatsu no taizai. Difficile de faire moins original qu'un titre qui veut dire « Les Sept Péchés Capitaux ». Le pitch de départ de la série est du même calibre : dans un monde médiéval où la magie existe, le royaume de Liones est protégé par les Chevaliers Sacrés, de redoutable combattants fidèles au roi. Enfin, ça, c'était jusqu'à leur trahison. La troisième fille du monarque, Elizabeth, s'enfuit alors du palais pour trouver de l'aide. Son objectif : réunir des guerriers capables de tenir tête aux Chevaliers Sacrés. Les seuls qui ont jamais été aussi fort, ce sont les Seven Deadly Sins, 7 puissants...Chevaliers Sacrés qui sont en fuite depuis 10 ans car on les accuse d'avoir assassiner le Général en Chef de leur ordre.

Vient la rencontre qui lance l'histoire : Elizabeth est sauvée par Meliodas, le chef des Seven Deadly Sins, qui accepte de l'aider dans sa quête. Cependant, plusieurs problèmes se posent. Tout d'abord, le groupe est dissout depuis des années et il va falloir retrouver chaque membre éparpillé à travers le royaume. De plus, Meliodas n'a plus de souvenir des tristres événements liés au complot orchestré contre son groupe. Depuis, il cache volontairement sa vrai force mais, à la différence de nombreux shonen, il n'a pas besoin de « s’entraîner pour battre un adversaire qui vient d'apparaître et qui est trop fort ». Une fois qu'il a pris sa mesure, le combat est terminé en quelques coups. Enfin, tout le royaume traquant Elizabeth, les Chevaliers Sacrés vont lancer leurs pires guerriers contre les héros. Notons que tous les Chevaliers ne semblent pas hostiles à la princesse.

Au fil des premiers tomes, on découvre les membres de cette troupe hétéroclite. Chaque combattant a son caractère, son physique particulier et ses capacités impressionnantes. Meliodas a l'apparence d'un jeune garçon et se bat avec une épée brisée. Sa perversité permet de petites scénettes marrantes avec l'étourdie Elizabeth. C'est le Dragon de la colère et vous aurez compris que ce schéma est déclinable avec les autres Seven Deadly Sins. Par exemple, Diane est une géante qui a le pouvoir de manipuler la terre. C'est le Serpent de l'envie et elle est follement amoureuse de Meliodas. Et ainsi de suite. Le monde de Seven Deadly Sins, nommé Britania, est plus vaste que le simple royaume de Liones et cache de nombreux secrets, factions et relations complexes. Une fois la troupe réunie et les bases de ce monde expliquée, la vraie histoire commence comme dans tout bon shonen.

UN VENT DE FRAICHEUR VENU DU PASSE

Au risque de m'enfoncer pour mieux remonter à la surface par la suite, l'aspect graphique ne va pas aider à moderniser le constat : Seven Deadly Sins est un manga old-school. Le trait de Nakaba Suzuki n'a rien à envier à celui d'un Dragon Quest : la Quête de Daï par exemple, œuvre publiée dès 1989. La grosse différence, c'est que le trait du mangaka Nakaba Suzuki est bien plus fin et le décor grassement détaillé. Cet artiste de 38 ans a débuté sa carrière professionnelle en 1994 et a connu le succès avec le manga Kongoh Bancho (12 tomes) publié dans le Weekly Shonen Sunday de l'éditeur Shogakukan. Cette série est disponible en France chez Kana.

Suzuki passe en 2012 chez la Kondansha (le troisième cador de l'industrie) pour lancer Seven Deadly Sins, un énorme succès critique et commercial. Le 16ème tome de la série s'est ainsi écoulé à 700 000 exemplaires, ce qui classe la série dans les 15 meilleures ventes de l'industrie. Publiée dans le Weekly Shōnen Magazine, principal concurrent du Weekly Shonen Jump de One Piece, et souvent comparé à Fairy Tale à ses débuts (avec qui il a proposé des crossovers), Seven Deadly Sins se démarque des autres mangas proposant un univers de fantasy comme Berserk, Ubel Blatt ou Claymore, tous bien plus violents. C'est logique, il s'agit là de seinen (manga pour jeune adulte) alors que c'est un shonen (manga pour jeune garçon), à l'exception du troisième. Le design des personnages est efficace auprès des plus jeunes alors que les lecteurs plus anciens y puisent une certaine nostalgie.

En effet, Seven Deadly Sins, c'est l'assurance d’être plongé dans une autre époque, la fin du 20ème siècle, celle d'une fantasy japonaise sacralisée par des tonnes de RPG cultes qui ne changent jamais de formules. Chaque page est un régal pour les yeux (un point en sa faveur en comparaison à l'atypique L'Attaque des Titans) alors que ce mangaka travaille sans assistant, fait rare au Japon. On a constamment ce sentiment agréable de familiarité. Forcément, les légendes arthuriennes sont une source d'inspiration flagrante alors qu'humour et baston se succèdent avec une mise en scène époustouflante de lisibilité. Le découpage est vraiment pensé pour épater le lecteur.

Le premier des trois arcs prévus s'est conclu au chapitre 100 avec un changement d'antagoniste pour les héros. L'auteur a déclaré avoir initialement prévu 20 tomes et trois arcs, mais il a déjà en tête une suite qui prolongerait l'histoire jusqu'au tome 30. Il a aussi ajouté que ce n'était que des estimations et qu'au final, tant qu'il aurait des idées, l'histoire serait poursuivit (il faudra sûrement prendre en compte les ventes, jurisprudence Dragon Ball oblige). L'objectif est aussi pour la Kodansha de voir Seven Deadly Sins prendre à terme le relais médiatique de L'Attaque des Titans publié depuis 2009 (dans le Bessatsu Shonen Magazine) car son auteur a annoncé que l'histoire sera conclue d'ici 3 ans.

UN DES SUCCES DE LA DECENNIE 2010

Si on se penche sur les ventes, Seven Deadly Sins semble donc jouer dans la cour des grands. Sur le premier semestre 2015, il a vendu 7 059 400 copies tous tomes confondus, devant One Piece (plus de 10 000 copies de différence) et loin devant Assassination Classeroom et L'Attaque des Titans qui sont respectivement à 5,2 et 5 millions de copies. 10 millions de tomes s'étaient déjà écoulés fin 2014, avec une forte accélération au second semestre de cette année 2014.

Là encore, c'est la même explication que pour L'Attaque des Titans : 15 tomes à rattraper alors qu'un anime est diffusé, c'est attractif pour les nouveaux lecteurs en comparaison aux 79 de One Piece. De plus, cette série attire aussi les lecteurs du manga d'Oda qui y trouve un univers radicalement différent de leur série favorite. Néanmoins, si on compare les ventes des nouveaux tomes, l'écart est colossal et en faveur de One Piece. Ainsi, le dernier tome de Seven Deadly Sins s'est vendu à environ 700 000 copies en 7 semaines, là où One Piece est déjà à 2,7 millions en 7 semaines. Bien sûr, ça va faire 20 ans que One Piece se vend, donc il a forcément de l'avance. Cependant, les fans ont déjà eu l'occasion d'acheter les premiers tomes. C'est juste une manière de rappeler le fossé naturel qui sépare les séries, surtout quand le manga d'Oda vend 3 millions pour une nouveauté en 2015.

Côté récompense, le manga est plébiscité, aussi bien au Japon qu'en France. Chez nous, avec une publication chez Pika Editions, il est dans la la sélection Angoulême et celle des lecteurs du magazine AnimeLand (meilleur manga). Au Japon, il a obtenu en 2015 le 39eme Prix Manga Kodansha catégorie Shonen, soit une récompense de son éditeur, ce qui n'est pas objectif mais montre bien l'importance de la série. 

Comme tous les succès, Seven Deadly Sins est exploité à travers tous les médias possibles, y compris des spin-off mangas. L'adaptation animée a été confiée au studio qui monte, A-1 Pictures (Sword Art Online, Silver Spoon, Aldnoah Zero). Diffusée dans le monde entier à travers le plateforme Crunchyroll et aussi et surtout sur Netflix (belle mise en avant), c'est un autre succès pour la licence. L'histoire est fidèle au manga et après une première saison entre octobre 2014 et mars 2015, une seconde sera diffusée en 2016. Il y a aussi un jeu vidéo sur 3DS en 2015, soit la console qui marche le mieux au Japon actuellement, surtout pour les adaptations de manga. Vous l'aurez compris, petit à petit, tout est mis en œuvre pour vous faire goûter à Seven Deadly Sins.

Si les graphismes ou l'univers de L'Attaque des Titans vous rebute, le manga Seven Deadly Sins est une alternative de qualité pour découvrir un nouveau shonen excitant. Le jugement sur la qualité de l'oeuvre ne pourra être objectif que dans quelques années vu le rythme hebdomadaire, mais une chose est sûr : cette série a déjà marqué son public. 

3 commentaires

  1. Pierr7ck
    Le 29 novembre 2015 à 16:48

    Je viens de commencer l'anime sur netflix c'est vraiment cool et joli. Puis ça tergiverse pas trop :D

  2. Farid
    Le 30 novembre 2015 à 17:49

    C'est vrai, c'est pas la série la plus bavarde :D

  3. Bart
    Le 01 décembre 2015 à 09:13

    J'ai aussi commencé a visionner l'anime. Mais il va falloir que je rattrape aussi mon retard sur le manga. C'est très sympa à suivre en tout cas

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