Le nouveau dessin animé Dragon Ball Super est-il nécessaire ?

L'annonce d'un nouvel animé Dragon Ball Super a pris de court des millions de fans qui n'ont même pas encore vu le retour de Freezer au cinéma. Avec très peu d'informations à notre disposition, dissertons sur ce sujet.

Avant de se lancer dans un discours remplit de mauvaise foi tintée de déception sur le sort d'une franchise adorée, résumons les informations à notre disposition depuis le 28 avril. Dès juillet, un nouveau dessin animé Dragon Ball Super sera diffusé au Japon tous les dimanches à 9 heures du matin. On vise clairement une cible jeune pour renouveler le public. L'histoire se déroule quelques années après la défaite de Buu. C'est toujours la Toei qui produit, avec le créateur du manga Akira Toriyama au scénario car il a lui-même proposé le pitch au studio. 18 ans après l'infâme Dragon Ball GT qui ne se basait pas sur le manga et qui présentait la vie de ces héros une décennie plus tard, voici enfin la suite que l'on attendait, celle écrite par Toriyama. Bon, il ne passe pas par la case manga d'abord, mais cela accélérera sans doute la production, ce qui n'est pas mauvais. Il faut dire que le mangaka se fait rare depuis la fin de Dragon Ball, si ce n'est quelques projets spéciaux. Le voir revenir sur sa licence la plus populaire était déjà une bénédiction en 2013 à l'occasion de la sortie du film Battle of Gods. Une histoire pas mauvaise, jouant à fond la carte de la nostalgie et se déroulant quelques mois après la fin de Dragon Ball Z. C'était le premier film animé Dragon Ball depuis l'Attaque du Dragon en 1995.

Suite à ce retour réussi, la Toei a passé un cap en s'attaquant à un méchant culte, Freezer, avec Fukkatsu no F. N'ayant pas encore vu ce film sorti le mois dernier au Japon, je ne peux donner mon avis sur la désormais célèbre transformation du vilain en Super Saiyen ! Là encore, Toriyama est impliqué directement dès le concept du film jusqu'au scénario et design. Papy Akira semble avoir de nouveau envie de jouer avec ses personnages, ce qui explique un peu mieux l'annonce de la nouvelle série. Toutefois, que faut-il attendre du retour régulier de DBZ ? Une nouvelle déception ou l'espoir d'un renouveau ? Il est franchement injuste de critiquer aujourd'hui ce projet porté par Kimitoshi Chioka, un réalisateur qui a travaillé sur de nombreux animés sans pour autant occuper le poste de numéro 1. Cependant, on peut déjà se demander si ce dessin animé est utile, que ce soit pour l'avenir de la licence ou tout simplement le plaisir des fans.

STOPPONS LE MASSACRE D'UNE LICENCE

Soyons clairs : Dragon Ball GT était un massacre. Malgré l'attrait de voir à chaque épisode un Trunk adulte, soit un des personnages les plus cools de la franchise, et le retour d'un Goku enfant comme dans Dragon Ball, l'histoire était sans conteste naze. Comme par hasard, depuis cette infamie, la Toei a stoppé la production de films animés jusqu'à récemment. La publication du manga étant conclue depuis 1995 et celle de la série TV depuis 1997, on vit depuis presque 20 ans sur un mythe, à coup de rediffusions et de moins en moins de produits dérivés. Doit-on vraiment parler des jeux vidéos ? Des millions de fans seraient prêt à tuer (ou tout du moins payer une somme élevée) pour avoir le jeu ultime de baston DBZ. Certains opus PS2 étaient de bonne facture, mais on a encore un goût d'inachevé.

Avec un tel potentiel, cette licence devrait combiner la jouabilité d'un Street Fighter à son casting démentiel. Parlons-en du casting : dans chaque jeu DBZ, on garde des personnages de côté pour le prochain opus, ou d'improbables DLC. Franchement, le dernier jeu sorti cette année, Dragon Ball Xenoverse, a démontré l'attente encore vivace du public. Au lieu d'une série animée périmée, ne vaut-il mieux pas avoir enfin un bon jeu profitant de la next-gen pour nous offrir des cinématiques de qualité ? Ça aurait plus de gueule aujourd'hui d'avoir un jeu de bonne facture, scénarisé par Toriyama, où l'on peut exercer sa nostalgie en étant l'acteur des combats. Côté papier, on épuise le filon avec des Manga-Comics tiré de l'animé (rien que le concept est ubuesque). Quant à DBZ Kai, si le projet est louable, il arrive à son terme, comme par hasard juste avant la diffusion de Dragon Ball Super... Bref, actuellement, la franchise tourne en rond. Sans nouveauté de poids depuis GT (Battle Of Gods était plus une réunion de famille), il faut prendre des risque. Fukkatsu no F avec la transformation de Freezer en est une. DB Super injectera probablement de nouvelles idées. Cependant, les fans sont déjà passés à autre chose.

UN UNIVERS QUI A PERDU SA FRAÎCHEUR

De 1984 à 1995 au Japon (et de 1993 à 2000 en France), le manga Dragon Ball a ravagé le cerveau de millions de lecteurs à travers le monde. 20 ans plus tard, celui qui était sans aucune contestation le roi des Shonen et un des meilleurs mangas jamais publié a sérieusement pris un coup de vieux. Prenons un peu de recul, grâce à nos lectures depuis 20 ans mais aussi à la démystification du phénomène Dragon Ball depuis notre enfance (c'était le sujet de discussion numéro 1 de tous les garçons). En analysant aujourd'hui l'oeuvre Dragon Ball, on remarque que la différence entre la partie Dragon Ball et DBZ n'est pas seulement liée à l'âge de Son Goku. Si ses aventures en tant que père de famille ont apporté une flopée de personnages tous plus charismatiques les uns que les autres (Végéta, Trunks, Son Gohan, les vilains de manière générale), c'est aussi clairement au détriment de l'histoire générale. Dans le fond, DBZ, c'était pas fou et ultra-simple comme scénario. Un méchant apparaît invariablement (Radditz, Végéta, Freezer, Cell, Buu) et les héros doivent le buter. Si Toriyama essaye de limiter l'impact de Son Goku à chaque fois pour mettre en avant le reste du casting, le héros revient inlassablement finir le travail. L'exception Cell n'est possible que grâce à sa présence, sinon on se retrouve dans la timeline du Trunks adulte.

Un manga aujourd'hui représente bien ce « syndrôme DBZ », c'est à dire une pluie de personnages plus cools les uns que les autres couplée à un scénario aussi fin qu'un allumette : Bleach. Quand on parle des héritiers de Dragon Ball, trois shonen du Jump se démarquaient pendant les années 2000 : Naruto, One Piece et Bleach. Le premier a un ton plus grave (la perte d'êtres chers), le second propose un univers d'une profondeur inégalée et le dernier mise tout de façon caricaturale sur la création effrénée de personnages prêts à se battre. Si Dragon Ball Super veut redorer l'image de la franchise, il ne faut pas juste créer un super vilain comme semble le promettre déjà la Toei. Non, ce qu'il faut, c'est comme à l'époque Dragon Ball et lors de certains passages entre les arcs de DBZ une histoire qui nous raconte toute simplement la vie de ces héros et de ce monde. Depuis le passage à DBZ, le monde ne sert que de champ de bataille, d'excuse pour tout exploser afin de démontrer la puissance des combattants. Alors que Dragon Ball puisait sa force dans un monde intriguant, envoûtant, à la croisée des influences.

Si One Piece alterne parfaitement entre découverte de son monde et affrontement musclé, un manga comme Fullmetal Alchimist met clairement l'accent sur son scénario. Jouant comme Naruto sur les émotions de ses héros (qui ne se résume pas à « aarrrgh pourquoi je n'arrive pas à te buter !!! »), ce shonen donne un coup de vieux à DBZ (pas Dragon Ball). Ces nouveaux héros sont bien plus complexes que nos bon vieux Son Goku et Vegeta, qui sont certes attachants par leur rivalité et leur volonté d'être le meilleur combattant, mais ils sont ultra-prévisibles. On connaît par cœur ces personnages et nous ne sommes plus surpris par eux. Il faut donc réellement envisager une fin à leur aventure, quitte à offrir plus de place à Gohan et Trunks, leurs dignes héritiers. On pourrait bien sûr tomber dans le cycle infini des comics, mais ce serait se priver d'une belle fin, ce qui est toujours important pour une histoire. Mais bon, malgré tout, revoir tous ces « amis » de notre enfance, ça reste quand même un bonheur incroyable, quand c'est bien fait bien sûr.

Tout le monde espère découvrir en juillet une belle histoire. On ne sait pas encore combien d'épisodes sont prévus (12 ? 24 ? 50 ? 100?) et rien nous oblige à assister à une énième chute de nos héros. Cependant, la curiosité sera trop forte. Croisons les doigts pour que Toriyama prépare une histoire intelligente qui apporte réellement quelque chose à son univers. Qu'il oublie ses énièmes révélations sur des dieux ou pouvoirs cachés des Saiyens. Il a à sa disposition des personnages incroyables pas encore pleinement exploités. Qu'il les utilisent !