Quand la créatrice du manga Fullmetal Alchimist et l'auteur d'une célèbre série de romans japonais d'heroic fantasy s'associent, cela donne une excellente aventure historique.
Fullmetal Alchemist, c'est pour beaucoup de lecteurs une des sensations manga des années 2000. Une série pas trop longue, deux animés explosifs, un succès mérité et une mangaka qui fait évoluer les codes du genre. Depuis, on se languissait d'avoir un nouveau titre de sa part, aussi prenant et dynamique. L'attente prit fin en 2015 avec la publication en France du premier tome de sa nouvelle saga, The Heroic Legend of Arslan.
Il était une fois Arslan
Voici le synopsis qui révèle en partie l'intrigue du premier tome : «An 320 du calendrier Parse. Le royaume occidental de Lusitania, monothéiste, envahit le royaume de Maryam dans sa guerre sainte pour imposer la foi en Yaldobaoth, son dieu unique, aux royaumes orientaux. Andragoras III, roi de Parse, est marié à la reine Tahaminé, considérée comme la plus belle femme du royaume, et a eu d'elle un fils, le prince Arslân qui a 14 ans. Ce jeune prince, sensible et doté d'une carrure fragile et d'un physique peu viril, n'est pas apprécié aussi bien par son père que par sa mère. Dirigeant sa vaste armée, le roi Andragoras III se porte à la rencontre des Lusitaniens dans la plaine d'Atropatènes. Il est accompagné de ses meilleurs généraux, dont les généraux Kahllahn et Darîun, ainsi que du jeune prince qui va livrer sa première bataille.
Mais Atropatènes se révèle être un piège mortel, tendu par le général Kahllahn, qui a trahi Parse, et par le dénommé "Masque d'Argent", un mystérieux étranger qui est général dans l'armée des Lusitaniens. L'armée Parse est défaite, subissant des pertes effroyables, et Andragoras est fait prisonnier par Masque d'Argent. Le début de la fuite pour le jeune Arslân qui, conseillé par de nouveaux camarades, devra apprendre à grandir et à changer sa vision du monde s'il veut libérer son pays de l'envahisseur Lusitanien et de l'usurpateur au masque d'argent...».
Première vie
Vous l'aurez compris, l'histoire est simple, comme tout bon roman de fantasy. En effet, ce manga est une adaptation de la série de romans Les Chroniques d'Arslan. Depuis 1986, 14 tomes ont été publiés au Japon par Yoshiki Tanaka, avec des illustrations de Yoshitaka Amano, connu pour son travail sur la licence Final Fantasy. Tanaka n'est pas un inconnu pour les fidèles de Pop Fixion. Il est aussi l'auteur de l'excellentissime saga de science-fiction Legend of the Galactic Heroes, que vous pouvez découvrir ICI. C'est un auteur culte, mais sa série de fantasy ne connaît pas une vie facile.
Il existe une première adaptation en manga des Chroniques d'Arslan. Publiée par l'éditeur Kadokawa Shoten dans son magazine Asuka Fantasy DX (Angelique, Fire Emblem, Cowboy Bebop, Lodoss) entre 1991 et 1996, la série est disponible en 16 tomes et possède un style bien différent de la version 2013. Les personnages sont plus androgynes, on est face à un shôjo d'aventure où les sentiments et l'aventure ont une place prépondérante. Au même moment, un animé est diffusé sous forme de 2 films, puis de 6 OAV, avec un design de Sachiko Kamimura (animatrice sur City Hunter et Black Jack). Le design est encore différent, ce qui rend la chose un peu confuse. Si le manga n'a pas été traduit chez nous, l'anime est disponible en DVD mais n'a pas connu le succès escompté.
Adaptation musclée
20 ans plus tard, la licence revient sur le devant de la scène avec une nouvelle adaptation multisupport. Cette fois cependant, tout est contrôlé avec un unique design et une histoire commune. Tout commence avec la prépublication du manga dès juillet 2013 au Japon dans le magazine Bessatsu Shônen Magazine, celui qui publie L'Attaque des Titans, une des trois plus grosses licences du moment. Ajoutez-y donc le génie de madame Hiromu Arakawa et vous avez là un incroyable cocktail qui a fait l'effet d'une bombe à son annonce.
Depuis la fin de Fullmetal Alchimist en 2010 dans le magazine Shônen Gangan de Square Enix, l'auteur Hiromu Arakawa poursuit sa carrière en racontant une histoire centrée sur l’agriculture dans sa série Silver Spoon publiée dans le Weekly Shônen Sunday de la Shogakukan. Succès critique et public, il n'atteint pas la popularité de FMA, en tout cas en dehors du Japon. Certains fans se languissaient donc des aventures guerrières des deux frères et l'auteur elle-même restait sur un semi-échec avec une oeuvre similaire nommée Hero Tales. La voir revenir à un genre qui lui réussit avec Arslan est donc un véritable plaisir. Publié dans le Bessatsu Shônen Magazine de la Kodansha (en France chez Kurokawa), The Heroic Legend of Arslan est un titre mensuel, ce qui laisse assez de temps à l'auteur pour jongler entre ses deux séries.
Le projet est né d'une proposition erronée d'un des éditeurs d’Arawaka qui pensait qu'elle était fan des romans de Tanaka. Le projet est tout de même concrétisé et face au succès qu'il rencontre, dès avril 2015, un animé voit le jour sous la houlette de Noriyuki Abe, réalisateur de l'excellente adaptation du manga Bleach. Le compositeur, Taro Iwashiro, est celui du second film FMA. Enfin, le jeu vidéo, lui aussi adaptant le manga, sort en février 2016 chez Koei Tecmo, les gars de la série Dynasty Warriors. Ce jeu n'est qu'un clone de ces beat'em all où l’on massacre des soldats par dizaines.
Une saga persane aux sources multiples
The Heroic Legend of Arslan, c'est une des plus grosses ventes au Japon en 2015, du même niveau qu'un One-Punch Man. Les raisons sont nombreuses tant la qualité est présente dans ce titre. Attention, encore une fois, c'est du grand classique, mais c'est efficace. Déjà, si vous adorez le trait de madame Arakawa, vous allez vous régaler. On a l'impression de replonger dans FMA mais à une autre époque.
Parlons-en du décor. L'histoire se déroule dans une sorte de pays au croisement de la Chine et la Perse antique. L'ennemi est une armée de croisés fanatiques qui n'hésitent pas à tuer, brûler et violer tout ceux qui ne croient pas en leur dieu. Les personnages sont parfois manichéens, mais cela aide le lecteur à s'attacher au héros qui peut paraître de prime abord faible et chiant. Sa bonté de cœur et son optimisme, couplé à sa relative fragilité, le rend sympathique face à la bande d'ordures qui ravagent ce royaume qui lui revient en héritage. Ses compagnons, tous forts et bien avisés, mais avec des caractères et des capacités complémentaires, forment une garde rapprochée qui protège le dernier espoir de son peuple.
De plus, l'occupation sanguinaire du royaume et le jeu intriguant tenu par la sublime reine s'oppose à la lumière diffusée par le petit groupe en cavale. La fuite des héros ne va pas pouvoir durer indéfiniment. Alors que le 6ème tome vient de sortir au Japon, on espère que l'histoire va s’accélérer, car Arslan et ses alliés promettent beaucoup, mais sont souvent déçus par leurs interlocuteurs car, dans ce monde, personne n’est digne de confiance.
Passez votre chemin devant le jeu, le manga mérite bien plus le coup d'oeil. Si vous êtes plus dynamique, il y a l'anime qui prend son temps, la seconde saison n'étant constituée que de 8 épisodes, avant une troisième cette année qui sera bien plus consistante.