Pop Fixion

Les créations Nintendo du 21ème siècle

Alors que Nintendo essaye de lancer une nouvelle licence phare avec Arms, retour sur un parcours créatif difficile de l’entreprise pour se renouveler.

Ahhh Nintendo… Une bien belle entreprise qui est présente dans le cœur de beaucoup d’enfants, petits et parfois bien plus grands. Une firme qui a su séduire grâce à des personnages superstar, très facilement identifiables par tous les publics. Une naissance de ces icônes pop à la transition des années 80 et 90 qui s’est transformée en de belles vies sous formes de jeux, livres, séries et autres produits dérivés.

Mais résumer les personnages de Mario, Link, Kirby ou encore Yoshi à leur image serait une erreur historique. En effet, ces héros ont tous accompagné des jeux qui ont marqué cette industrie aussi par leurs qualités en tant que jeux vidéo. Mario a été le maître étalon du jeu de plateforme, tandis que Zelda était lui un exemple pour tous les bons jeux d’aventure. Tout cela permet de raconter de jolies histoires… Mais il y a un mais...

Si Nintendo a indéniablement été novateur, beaucoup sont ceux qui lui reprochent de choisir la facilité en utilisant éternellement les mêmes licences dans de nombreux jeux différents. Un recyclage permanent qui serait à l’origine d’une forte baisse d’estime vis à vis de la marque et qui aurait fait fuir un bon nombre d’autoproclamés « gamers ». 

Conscient du problème, Nintendo a commencé à proposer de nouvelles créations avec l’arrivée des années 2000, mais ce n’est que quinze ans plus tard que la multinationale japonaise semble avoir réussi/

2001 : de nouvelles franchises pour des genres peu fédérateurs

Nous sommes au début des années 2000, l’univers du jeu vidéo va vivre un de ses plus grands tournants avec la mise en place du triumvirat de constructeurs : Sony, Microsoft et Nintendo. À cette date cela fait environ 10 ans que Nintendo n’a pas proposé de nouvelles licences fortes développées en interne. Les années 90 ont été la période d’incubation des jeux en tous genres reprenant les personnages phare dans la lignée des Mario Kart et compagnie…

Nintendo s’est donc lancé dans la mise en chantier de deux nouvelles licences pour sa console de salon Gamecube : Animal Crossing et Pikmin. Même si la première est aussi sortie sur une Nintendo 64 en fin de vie. La création de ces deux jeux a été marquée par l’implication de deux personnes qui vont influencer fortement le destin créatif de la firme jusqu’à nos jours.

Animal Crossing premier du nom est un jeu sorti en avril 2001. Porté par un style assez novateur, la licence parvient à devenir un succès au Japon bien qu’elle prenne plusieurs mois et années à être exportée. C’est Hisashi Nogami qui est le réalisateur du jeu à l’époque et qui a impulsé le système de jeu communautaire, avec des personnages qui vivent dans un petit village à développer. Une vraie petite vie parallèle en somme. Qu’on se le dise, cette création a clairement été salutaire pour Nintendo, amenant du neuf aussi bien dans l’artistique que le gameplay. Mais on est loin d’un titre aussi grand public qu’un Mario.

Pikmin, quant à lui, est sorti fin 2001 au Japon et a rapidement eu le droit d’être vendu sur tous les continents. Probablement car Shigeru Miyamoto, le saint père de Mario, a été un élément important de la création du jeu. Il a apporté l’idée des toutes ces petites créatures pouvant réaliser tout un tas d’actions dans un jeu de gestion en quelque sorte.

Deux jeux aux directions artistiques fortes et tentant le renouveau des mécaniques de jeu. Des univers bien installés aujourd’hui mais qui n’ont pas pu lorgner le grade de série mythique car s’adressant à une petite partie du public.

2005 – 2006 : la simulation de vie, un plaisir éphémère

Le milieu des années 2000 est peut-être une des périodes les plus fastes pour Nintendo, ses deux consoles la Nintendo DS et la Wii sont en train de conquérir le marché grâce à leurs technologies novatrices : l’utilisation du tactile pour la console portable et la reconnaissance de mouvements pour celle de salon.

De magnifiques succès matériels qui ne permettent pourtant pas de réelles créations de franchises. En réalité cette période va être marquée par l’utilisation de ces techniques, des modes de gameplay plus importants que les univers présents dans les jeux. Les nouvelles productions à succès développent ainsi des univers réalistes ou humains, loin des purs produits de fiction made in Nintendo.

Shigeru Miyamoto n’est pas étranger à tout ce phénomène, il va en effet chercher son inspiration directement dans sa vie de tous les jours et instiller ses idées dans le développement des jeux comme pour Nintendogs ou Wii Sports. Du jeu très grand public, sans défis et pour passer des moments sympathiques. Une approche permettant d’attirer de nouveaux joueurs et qui fera fuir les « gamers ».

Pourtant, ces simulations de vie fonctionnent, en partie grâce à une nouvelle identité visuelle forte : les Mii, de petits avatars qui seront déclinés dans nombre de jeux. Ironie de l’histoire, si les concepts de jeux reviennent à Miyamoto, c’est bien Nosami qui a fortement aidé au développement des Mii, seule réelle création artistique de cette période.

Nos deux compères créateurs se sont donc engouffrés dans une voie sans issue, car bénéficiant d’un effet de mode éphémère. C’est pourtant le côté artistique de Nosami qui va permettre le renouveau de Nintendo.

2015 : Quand les calamars prennent le pouvoir

C’est en pleine exploitation de la Wii U que Nintendo a décidé de rebattre les cartes de ses licences. Nouvelles directions artistiques pour des personnages emblématiques comme Yoshi ou Kirby, qui deviennent des jeux aux graphismes « faits mains » mais surtout proposition d’un projet vidéoludique nouveau et ambitieux : Splatoon.

En effet, à cette date Nintendo, malgré ses premiers essais dans les années 2000, n’avait jamais essayé de sortir un type de jeu prisé par les joueurs et les autres éditeurs : le jeu de shoot. Splatoon est pourtant de cette trempe-là, un jeu aux mécaniques de « gamers », avec ses parties rapides, en équipe et en ligne. Mais il contient tous les éléments de l’ADN Nintendo : une direction artistique pour tous avec des personnages identifiables et charismatiques.

On peut se demander pourquoi une telle chose a réussi à voir le jour ? Tout simplement grâce à une équipe de création plutôt jeune et indépendante par rapport au reste de l’entreprise et grâce à une situation critique de la Wii U qui pouvait essayer des choses nouvelles pour se relancer.

Si cette jeune équipe a convaincu c’est grâce à la fraîcheur qui s’est dégagée de cet univers et à des modes de jeux parfaitement adaptés à l’ère actuelle. Des directions prises sous l’égide de Nogami qui a produit le jeu, un référent qui au final a toujours essayé de créer de nouveaux univers, alors que Miyamoto, lui, est resté assez externe à ce développement, sentant peut-être ses réflexions moins performantes et les critiques qui commençaient à apparaître sur sa vision peut-être datée.

Au final, une licence qui a réellement plu au public et même aux joueurs moins attirés par l’univers Nintendo habituellement. L’entreprise comprend qu’elle a retrouvé de sa superbe et va bichonner tous ses joueurs en leur proposant régulièrement des mises à jour gratuites.

2017 : l’art de mettre les poings sur la table

Enfermé dans une spirale de méventes, Nintendo met rapidement fin au cycle de vie de sa console de salon au gameplay asymétrique. Une fin morose pour la Wii U, qui va pourtant être vite compensée par l’annonce de suites et portages de ses meilleurs jeux sur la toute nouvelle Nintendo Switch. Bien entendu les fameux Inkling refont parler d’eux, et Splatoon 2 est présenté comme le jeu à posséder pour tout amateur de parties en ligne.

Mais ce qui retient l’attention c’est l’annonce d’une toute nouvelle licence pouvant paraître un peu simple au départ. Arms est ainsi lancé dans la cour des grands, reprenant la même sauce ludique et colorée, cette fois un jeu Nintendo s’attaque au genre du Combat en Versus. Pour développer Arms, Nintendo a créé une nouvelle branche de studio, la division EPD. L’équipe du jeu est ainsi non seulement jeune, mais en plus avec peu d’expérience Nintendo. Une certaine fraîcheur d’esprit qui semble avoir payé.

En effet, force est de constater que les personnages de Arms sont tous travaillés. Avec des bras extensibles pour pouvoir se cogner ils développent tous leurs designs uniques, avec une femme aux bras de nouilles udon ou encore un champion à la combinaison rose fluo. Un univers déjanté qui est associé à un jeu plus dense qu’il n’y paraît : nombreux équipements, possibilités de customiser les poings de son personnage, plusieurs techniques d’attaques et de contre, jeu à quatre combattants… Tout cela laisse présager un investissement fort de la part des équipes de Nintendo.

Un nouveau qui ne demande qu’à fonctionner et qui ferait enfin sortir l’entreprise d’une spirale autoalimentée de jeux Mario. Un détachement nécessaire de leur moustachu préféré pour arriver à reconquérir le cœur de tous les joueurs qui savent apprécier le talent de Nintendo mais qui attendent plus d’originalité de leur part.

L’histoire du 21ème siècle est encore à construire pour Nintendo. Si elle a su proposer plusieurs fois de nouvelles licences, elle n’a compris que trop tardivement ce qui était dans l’air du temps. Le succès a parfois été là, mais il n’a pas réussi à s’inscrire dans la légende de l’entreprise qui a probablement souffert d’une certaine inertie de ses têtes pensantes. Au final ce sont bien les nouvelles générations qui ont réussi à imposer une nouvelle vision fédératrice. Une démarche difficile à avoir pour cette vieille entreprise quasiment familiale.

Aucun commentaire

Tags

Sur le même thême

Pop Fixion

A propos de Pop Fixion

Pop Fixion est un magazine proposant des articles sur la Pop Culture et ses médias : comics, mangas, BD, jeux vidéo, films, animation, séries tv et romans.

Informations complémentaires

Vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données qui vous concernent conformément à l'article 34 de la loi "Informatique et Libertés" du 6 janvier 1978. Vous pouvez à tout moment demander que vos contributions à ce site soient supprimées.