Découvrir un autre peuple, pays ou culture, ce n'est pas toujours facile mais diablement enrichissant.
Le collectif vous propose chaque semaine un nouveau numéro de la rubrique Un Thème des Oeuvres. Le concept est simple : vous faire (re)découvrir des œuvres que nous apprécions sous l'angle d'un thème précis. N'y voyez pas là une sélection parfaite ou la liste des indispensables. Ce sont plus des coups de cœurs qui méritent votre attention et vos remarques, en essayant d'équilibrer la liste avec des situations variées. Nous souhaitons vous présenter des œuvres différentes, venant de nombreux médias et visant un large public. Bonne lecture ou visionnage et surtout, n'oubliez pas : l'important, c'est de prendre du plaisir !
Par Mayla, Daft Venom, Bart et Farid.
Biguden – Bande dessinée
Et si on parlait d’une BD dont l’action se situe en Bretagne, avec tout le folklore que ça entraine. Ainsi crêpes, bigouden, korrigan et bagad sont de la partie, ce qui disons-le, est fort dépaysant pour les lecteurs qui ne baignent pas dans cette culture. Mais tout l’intérêt de cette trilogie est de créer un choc des cultures au sein de l’histoire, et non pas seulement pour les lecteurs. On se retrouve en effet à suivre les aventures de Goulwen, petit garçon rouquin qui pourrait probablement être plus sociable, mais il n’est pas aidé par sa mère adoratrice d’écrans et sa grand-mère une authentique bigouden un poil aigrie. Le destin de ces personnages va changer à cause d’une jeune naufragée du « bout du monde » qu’ils vont accueillir. Très rapidement cette pièce rapportée d’Asie va s’intégrer en développant des dons particuliers lui permettant de voir toutes les entités mystiques bretonnes, privilège réservé pourtant aux seules bigoudens. Mais peut être que ces dons sont dus à des origines elles aussi mystérieuses, que Goulwen ne tardera pas à découvrir. Cette lecture arrive donc à mêler habilement deux cultures opposées mais liées par les mythes traditionnels. Une bien belle aventure servie par Stan Silas, qui sait jouer avec toutes les émotions pour le plaisir des lecteurs.
Dans avec les loups – Cinéma et Roman
Avec sept Oscars et plus de 400 millions de dollars de recettes en 1990, ce film, adaptation d'un roman de Michael Blake, raconte l'histoire d'un combattant de la guerre de Sécession. Désirant fuir les horreurs de cette guerre, il se fait muter à l'Ouest du pays, région encore sauvage où les conflits entre colons et indiens sont encore terrible. Le personnage découvre ces territoires et les tribus locales. Son implication est totale, allant jusqu'à intégrer une nouvelle famille, jusqu'à ce que son propre monde ne le rattrape et lui fasse payer ce choix de vie. Avec un Kevin Costner au sommet de son art (il réalise aussi le film), cette histoire met en lumière la difficile relation entre blancs et indiens, ces derniers ayant quasiment disparu de la surface de leurs continents. Un autre regard sur une terrible guerre qui pose encore problème aujourd'hui dans la mémoire collective américaine.
Trillium - Comics
Elle est biologiste, lui est explorateur. Lui a un traumatisme de guerre, elle a perdu sa mère. Elle s’appelle Nika, lui s’appelle William. Lui vit en 1921, elle vit en 3797. Autant dire que leur rencontre les marquera à jamais. Les deux sont humains, mais en presque 2000 ans le langage a évolué et ils ne se comprennent pas, tout en ne comprenant pas ce qui leur arrive. Ils vont donc devoir essayer de communiquer. Et c’est là que le talent de Jeff Lemire entre en jeu, il trouve des moyens de nous faire comprendre ce que chacun essaie de dire, alors que l’on a qu’un côté de la conversation. Et quand une race extraterrestre se rajoute dans l’équation, avec une autre langue, la lecture se complique, malgré l’aide fournie dans l’édition d’Urban Comics qui nous donne les clés pour traduire ce langage, et même les textes directement traduits si on ne veut pas s’embêter à le faire. Ce comics écrit et dessiné par Jeff Lemire est un chef d’œuvre où en plus des problèmes de langage, le lecteur doit tourner son comics pour lire une ou l’autre des époques.
Les Lettres Persanes - Roman
Ce roman épistolaire a été écrit anonymement par Montesquieu, qui craignait que l’on n’accueille fraîchement cette oeuvre vu la critique ouverte de la France qu’il renferme. Il prétend alors qu’il en est juste le traducteur et le livre sera publié en 1721 à Amsterdam. Dans ces pages, nous découvrons deux Perses venus d’Ispahan : Usbek et Rica. Tous deux quittent leur pays, par nécessité ou par curiosité, afin d’étudier les moeurs occidentales et plus particulièrement celles de la France. S’ils commencent leur voyage ensemble, ils finissent par se séparer pour découvrir ce pays chacun de leur côté. C’est dans les lettres envoyées à leurs amis, familles, concubines et ensuite entre eux que nous découvrons notre pays au travers du regard de ces deux étrangers aux coutumes très différentes. On peut y lire une comparaison entre l’Orient et l’Occident, y découvrir le clivage culturel, social et politique. C’est avec leur regard à la fois critique et acéré que nous découvrons la politique, les pratiques religieuses ainsi que la société d’alors en en soulevant les contradictions et l’absurdité. Ce qui est malin dans cette écriture, c’est que lorsqu’on écrit sous forme de lettres de voyage, on a tendance à moins y voir une critique, plus un regard objectif, fait d’impressions quasi instantanées. Car voir les choses au travers d’un regard externe est moins mal accueilli que si c’étaient les propos d’une personne du pays.
Lost in Translation - Cinéma
Bob Harris (Bill Murray; SOS Fantômes) est un acteur en plein déclin. Ayant besoin d’argent, il accepte de partir à Tokyo afin de tourner une publicité pour un whisky. Déstabilisé par les moeurs japonaises, isolé dans sa chambre d’hôtel, il trompe son ennui comme il le peut. Dans ce même hôtel, Charlotte (Scarlett Johansonn; Avengers), une jeune américaine, accompagne son mari photographe. Ce dernier, plus intéressé par son travail que par son épouse, la délaisse. Elle erre, désabusée et rencontre Bob. C’est alors que ces deux personnes, perdues dans ce pays totalement hermétique à leur yeux vont prendre un chemin commun. Si ce film est quand même bourré de clichés (non, les hauteurs de douches sont assez grandes pour nous, occidentaux), il montre à quel point on peut être déstabilisé et perdu dans un environnement qu’on ne maîtrise pas du tout. Les deux héros ne parlent pas la langue, ne comprennent pas du tout la culture et se retrouvent noyés dans un monde où ils se sentent anonymes et incompris. Ce film de Sophia Coppola a été encensé par la critique mais me laisse, d’un point de vue ouverture culturelle, perplexe : ces personnes qui ont eu la chance de se retrouver dans un pays totalement différent n’ont pas vraiment cherché à s’en imprégner, ni d’en découvrir les mystères. Bien au contraire, ils se complaisent, surtout Bob, dans leur petite bulle occidentale, juchés en haut de leur tour d’ivoire. Mais en même temps, n’est-ce pas cette bulle qui mènera au rapprochement de ces deux personnes désabusées ?
N'hésitez pas à laisser en commentaires vos propres choix. Rendez-vous la semaine prochaine pour un nouveau sujets et d'autres œuvres !