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Ennemis Jurés : les antagonistes dans la fiction

Il n'y a pas de bonne histoire sans un adversaire digne de ce nom, sans un antagoniste charismatique qui est souvent à l'origine de l'intrigue. Analyse.

Il serait vain de rechercher l'origine exacte des ennemis jurés puisque l'on retrouve ce type de personnages dès l'antiquité, Poséidon ou Zeus s'opposent par exemple, en tant que Dieux, à Ulysse dans l'Odyssée d'Homère. Proposer une définition exhaustive relève également de la gageure puisqu'un pire ennemi peut arborer différents visages. Cependant, nous allons tenter de dresser un portrait complet des Ennemis Jurés dans la fiction et de dégager un maximum de traits communs aux Seigneurs des Ténèbres, aux savants fous et autres super-vilains.

De Grands Mythes

Les plus anciens ennemis jurés sont issus des grands mythes de notre société. Dans la mythologie égyptienne, Seth est le principal adversaire d'Horus, son neveu. Il lui fera subir les pires sévices avant que le dieu à tête de faucon ne parvienne à triompher. Dans les croyances judéo-chrétiennes et musulmanes, on retrouve les deux frères ennemis, Abel et Caïn. En assassinant son cadet, préféré de Dieu, Caïn devient le premier meurtrier de l'humanité (selon le mythe).

Par la suite, de nombreux récits mettront en scène des frères ennemis comme le roman Pierre et Jean, de Maupassant dans lequel une question d'héritage et un secret de famille viennent bouleverser la vie des deux frères ; ou la série romanesque le Journal d'un Vampire qui oppose sans cesse Stefan et Salvatore, deux frères vampires. L'on peut aussi considérer que la rivalité entre Jack et Locke dans Lost se rapproche de ce principe de frères ennemis que tout oppose : l'un inspiré par la foi, l'autre par la raison. Bien sûr, en parallèle, dans la mythologie nordique, d'autres célèbres (demi-)frères s'affrontent : Thor et Loki (ce dernier étant l'équivalent scandinave du dieu Seth). Toujours dans les trois religions monothéistes, l'on retrouve la figure du Diable (Satan, Lucifer, Sheitan), une sorte d'ancêtre du Seigneur des Ténèbres. L'on peut également considérer que Moïse et le Pharaon sont des ennemis jurés.

 

Récurrence

Tout d'abord, ce qui rend l'ennemi juré plus important que les autres adversaires d'un héros, c'est sa faculté à réapparaître, encore et encore, jusqu'à ce qu'il soit vaincu. C'est le cas de Lord Voldemort, dans la saga romanesque Harry Potter, dont l'ombre plane au-dessus de chaque aventure, même s'il n'est physiquement présent que dans trois tomes (La Coupe de Feu, L'Ordre du Phénix et Les Reliques de la Mort) et agit sous la forme d'une entité dans deux tomes (À l'école des sorciers et La Chambre des secrets). Dans la saga de jeux Kingdom Hearts, le scénariste a choisi de repousser les limites de cette récurrence en offrant à Maître Xehanort, le méchant principal, la capacité de s'incarner de plusieurs façons. C'est une façon habile de changer d'adversaire sans en changer vraiment, une sorte de compromis scénaristique.

Dans des récits qui se veulent plus réalistes, il est moins convenu de faire intervenir un ennemi à chaque épisode. Dans la série Médium, Allison Dubois est confrontée au fantôme d'un tueur en série, le Docteur Charles Walker (incarné par Mark Sheppard) qui la poussera dans ses retranchements en s'en prenant à sa famille. Ce personnage n'apparaît que dans trois épisodes, mais peut être considéré comme un pire ennemi à cause de ses actions et de sa persistance à réapparaître. Dans la série 24, c'est le Président Logan qui fait office d'ennemi juré pour Jack Bauer en parvenant à se hisser au sommet du pouvoir. Même après sa chute, il aura tendance à revenir pour semer le chaos, en ayant pour but final la destruction de Bauer.

Faut-il toujours périr ?

Néanmoins, comment un auteur peut-il se débarrasser d'un puissant ennemi sans prendre le risque de le perdre définitivement ? La réponse est simple et la méthode souvent employée : le lecteur/spectateur ainsi que le héros doivent penser que le méchant est mort alors qu'il ne l'est pas. C'est le cas de très nombreux personnages dans les comics, comme Magnéto, chez Marvel, dont la mort et la résurrection sont devenus une sorte de gag. Dans la bande dessinée franco-belge, l'on pourrait citer le vil Rastapopoulos, ennemi juré de Tintin, qui a souvent mis en scène sa propre mort pour mieux s'enfuir. Hergé s'en débarrassera « définitivement » dans l'album Vol 714 pour Sydney, à la fin duquel des extraterrestres enlèveront le truand. J'ai mis volontairement « définitivement » entre guillemets car des hypothèses sur l'histoire inachevée Tintin et l'Alph-Art font de l'ennemi Endaddine Akass une identité secrète derrière laquelle se cacherait en réalité Rastapopoulos. Dans la série britannique Doctor Who, les ennemis du Docteur, qu'il s'agisse des Daleks ou des Cybermen, trouvent toujours le moyen de revenir, violant ainsi les règles du Temps lui-même.

Il existe toutefois un contre-exemple très intéressant, celui du Professeur Moriarty, ennemi juré de Sherlock Holmes. C'est en 1893 qu'Arthur Conan-Doyle publie la nouvelle Le Dernier Problème, dans laquelle il fait intervenir un pendant maléfique du célèbre détective. Soucieux d'en terminer avec son personnage, Conan-Doyle écrit donc la chute (littérale et métaphorique) de Sherlock Holmes. En effet, à la suite d'un affrontement terrible, les deux hommes basculent dans les chutes du Reichenbach. Mais les lecteurs sont si furieux que vingt ans plus tard, l'auteur est contraint de ressusciter son héros. Dans la Maison Vide, Holmes explique que seul Moriarty est tombé. Durant les quinze années suivantes, Conan-Doyle citera le nom de Moriarty dans six autres nouvelles. On est donc loin de l'excès d'apparitions. Cependant, toutes les adaptations suivantes, au cinéma ou à la télévision, en feront l'adversaire ultime car Moriarty est le seul assez intelligent pour rivaliser avec Holmes.

Puissance, charisme et style

Bien qu'il existe des antagonistes qui soient sots, voire incapables de mener leur projet à bien (Tom, dans Tom et Jerry, Iznogoud, la Team Rocket dans Pokemon), la plupart des ennemis principaux sont à la fois charismatiques, puissants et reflètent, par leur aspect physique, leur inclination pour le Mal. Ces êtres-là voient leur cruauté comme une finalité, un moyen de parvenir à leurs fins, de se hisser au sommet. L'on peut aisément citer Lord Voldemort qui, en divisant son âme en sept parties qu'il enferme dans des Horcruxes afin d'échapper à la mort, prend peu à peu le visage d'un monstre, d'un serpent. Dans The Legend of Zelda, Ganondorf souhaite compléter la Triforce pour accroître sa puissance. Dans Ocarina of Time, il parvient même à se changer en démon, un démon que Link affrontera plusieurs fois. C'est la raison pour laquelle les affrontements finaux contre lui contiennent souvent trois ou quatre phases. Voldemort, Ganondorf ou encore Sauron s'apparentent à des « Seigneur des Ténèbres ». Non seulement les héros sont conscients de leur incommensurable puissance, mais eux-mêmes savent qu'ils repoussent plus loin que personne les limites de la nature. Voldemort vaincra la mort, Ganondorf traverse les époques (on ignore toutefois s'il s'agit du même individu ou d'une incarnation, comme pour Zelda et Link) et Sauron n'est rien de moins que le fidèle serviteur de Morgoth, une divinité de la Terre du Milieu. Ses pouvoirs sont immenses. Voldemort et Sauron ont ceci en commun que leur vie est rattachée à des objets qui les maintiennent en vie (les Horcruxes pour l'un, l'Anneau Unique pour l'autre). Jafar, dans le Retour de Jafar, ne peut être détruit qu'avec sa lampe. Le principe reste le même.

Disney est un excellent vivier d'antagonistes charismatiques. Nous venons de citer Jafar, ennemi d'Aladdin, dont la puissance croît radicalement au cours du film, ses habits changeant d'aspects en même temps. En effet, sa tenue devient plus anguleuse lorsque le Génie fait de lui un sorcier. Ensuite, il devient un Génie lui-même. Maléfique et Jafar possèdent de nombreuses similitudes. Outre la couleur dominante de leur tenue, le noir, tous deux sont élancés, munis d'une canne et se transforment lors du combat final. Dans le même ordre d'idées, Ursula, principale antagoniste de la Petite Sirène, devient terrifiante lors des dernières scènes quand son corps grandit afin d'atteindre une taille gigantesque. Que dire, également, de Scar et Frollo, les méchants les plus réalistes de l'univers Disney ? Tous deux doublés par l'acteur Jean Piat, ils n'hésitent pas à assassiner froidement ceux qui se mettent en travers de leur chemin.

Jamais vraiment morts

Un ennemi doté d'une faiblesse, aussi mineure soit-elle, peut parfois déplaire à certains auteurs et scénaristes qui veulent octroyer à leurs méchants une aura bien particulière. Ces antagonistes seront si extraordinaires que leur mort est inenvisageable. C'est le cas d'Anubis, dans la série Stargate SG-1, l'un des Goa'uld les plus puissants de l'univers, qui livrera un duel perpétuel contre l'Ancienne Oma Desala car ni l'un ni l'autre ne peut mourir. Dans la saga de jeux Mass Effect, seuls les Moissonneurs qui ont envahi la Terre sont vraiment détruits (ou non, selon le choix du joueur), la race extraterrestre continuant de vivre aux confins de l'univers.

Le titan Cronos, dans la saga littéraire Percy Jackson, survit dans le Tartare à la fin de la saga, bien qu'il ne soit plus capable de s'incarner sur Terre, trop affaibli. En fait, Sauron lui-même ne disparaît pas réellement à la fin du Retour du Roi, son esprit privé de pouvoirs ne peut qu'errer, invisible, en attendant le retour de son maître Morgoth. Dans une certaine mesure, Voldemort survit aussi sous la forme d'une entité torturée et impuissante, comme en témoigne la vision de Harry dans ce lieu onirique où l'attend Dumbledore à la fin des Reliques de la Mort. En mutilant leur âme, ces êtres si puissants sont ainsi condamnés à vivre éternellement sous une forme misérable.

Insaisissables

Sauron fait partie de ces ennemis que les héros ne peuvent approcher tant ils sont puissants, malins ou bien entourés. Qu'ils soient dotés de magie ou de technologie, ils ne peuvent être combattus directement. L'on pourrait citer Glados, l'IA cynique des deux jeux Portal, qui n'est qu'une voix à l'oreille du joueur pendant la plus grosse partie du jeu. Elle apparaît bien sous la forme d'une machine afin de faciliter le combat final, mais une IA ne peut réellement être vaincue. Skynet, dans la saga cinématographique Terminator, se relève à chaque fois et parvient même à ses fins lors de la dernière scène du troisième film. Dans les romans d'Arthur C. Clarke Les Odyssées de l'Espace, HAL 9000, bien que déconnecté à la fin de 2001, l'Odyssée de l'Espace, est réactivé dans 2010, L'Année du Premier Contact. Il existe, bien entendu, un contre-exemple. Dans la série animée Code Lyoko, les Lyoko-Guerriers parviennent, après quatre saisons de luttes contre l'Intelligence-Artificielle nommée XANA, à l'effacer définitivement.

Des antagonistes sont parfois physiquement impalpables, cela signifie que le héros ne peut pas le vaincre directement. Dans Smallville, les scénaristes ont choisi de représenter Darkseid sous la forme d'une planète, Apokolips, et le super-vilain de DC Comics ne peut agir que grâce à ses hôtes qui arborent le symbole Oméga. Dans Buffy contre les Vampires, l'antagoniste final est La Force, la source de tout Mal, une entité immatérielle qui pousse les autres à commettre des méfaits à sa place. Elle ne peut jamais vraiment disparaître.

Enfin, plus réaliste, l'on pourrait ranger dans cette catégorie les méchants qui s'enfuient à la fin de chaque intrigue, glissant entre les doigts des héros et échappant à la justice, tels Fantomas ou la Team Rocket.

Aidé par un lieutenant

Qu'il soit fort ou insaisissable, personnage de papier ou à l'écran, l'antagoniste principal est souvent accompagné, épaulé, assisté par un lieutenant, une sorte de gardien qui se dresse entre son maître et le héros. Popularisé par le jeu vidéo, ce lieutenant est souvent presque aussi puissant, cruel et malin que l'ennemi juré des personnages. L'on peut citer Bellatrix Lestrange, dans les romans Harry Potter, qui, lors de la Bataille de Poudlard, affronte d'abord Hermione, Luna et Ginny, avant d'être vaincue par Molly Weasley. Mais le serpent Nagini peut aussi être considéré comme un lieutenant puisque, en tant que Horcruxe, il sera l'avant-dernier à mourir afin que Harry puisse porter le coup de grâce à Voldemort. Dans le Seigneur des Anneaux, Gollum ne peut pas vraiment être appelé « lieutenant » puisqu'il ne travaille pas directement pour Sauron. Au contraire, même, il provoquera sa chute en tombant dans la lave de la Montagne du Destin avec l'Anneau Unique et le doigt de Frodon. Le Roi-Sorcier d'Angmar, chef des Nazgûl, est le plus fort des serviteurs du Seigneur des Ténèbres. Il ne meurt pas immédiatement avant son maître mais ce n'est pas une règle absolue. Cela n'empêchera pas Sauron de lancer ses derniers soldats à l'assaut des armées du Gondor et du Rohan réunies devant la Porte Noire.

Dark Vador est un exemple intéressant. Bien qu'il soit considéré comme l'antagoniste visible de la première trilogie Star Wars, l'Empereur incarnant l'ennemi « invisible » (il apparaît peu à l'écran), Vador constitue bien l'ultime rempart entre Luke et son maître. Toutefois, supplié par son fils, Vador reviendra vers la lumière et précipitera Palpatine dans le cœur de l'Étoile Noire. D'autres lieutenants se retournent contre leur supérieur au dernier instant : les Hyènes dans le Roi Lion se sentant trahies par les propos de Scar, le dévorent ; Grìma, lassé des moqueries blessantes de Saroumane, lui tranche la gorge.

Concernant le jeu vidéo, les boss de fin de niveaux servent de lieutenants, leur nombre, souvent élevé, permet au joueur de prouver sa force avant de passer au niveau suivant. Bowser Junior (la saga Super Mario), Psycho Mantis (Metal Gear Solid) ou les membres de l'Organisation XIII (Kingdom Hearts) en sont de parfaits exemples.

Deux antagonistes chez Victor Hugo

Certains auteurs, adeptes du réalisme dans la fiction, n'hésitent pas à soigner leurs antagonistes, à développer leur histoire afin de les rendre plus humains mais aussi plus ambigus. Victor Hugo dépeint ses méchants avec brio et leur donne beaucoup de substance. Javert (Les Misérables), flic très à cheval sur la justice et persuadé qu'un criminel ne pourra jamais se racheter, et Frollo, Archidiacre de Notre-Dame sexuellement attiré par Esméralda, sont assez proches l'un et l'autre. Tous deux croient dur comme fer en leurs valeurs, la justice pour le premier, la foi pour le second. Tout en traquant Jean Valjean sans relâche, Javert apprend à connaître cet homme qu'il ne considérait que comme un potentiel récidiviste. Or, Valjean, lui aussi, réprouve l'injustice à tel point qu'il se présente au procès d'un homme que l'on accuse d'être Jean Valjean et se dénonce. De plus, il arrachera Cosette aux Thénardier qui la maltraitent depuis que sa mère, Fantine, leur a laissé en garde. Ainsi, là où Javert incarne une justice dure et impartiale, Valjean se montre plus humaniste et ses choix sauvent des vies. D'ailleurs, son ennemi juré, en comprenant qu'il s'est fourvoyé, qu'un ancien forçat condamné au bagne peut racheter ses fautes par de bonnes actions, décide de se suicider.

Claude Frollo, lui, est un homme qui cherche à combler un vide. Il veut de la reconnaissance, avoir le dessus sur les gens et est prêt à faire de bonnes actions pour cela. Il s'occupera de son frère nouveau-né Jehan, recueillera Quasimodo et enseignera la théologie à des élèves... Mais cela ne sert qu'à cacher ses désirs, comme celui qu'il éprouve pour Esméralda. De ses frustrations naîtra sa violence.

D'autres méchants complexes

De nombreuses fictions tentent de s'émanciper des règles du « méchant » classique. Ainsi, certains antagonistes seront dotés d'un objectif défendable tout en employant des méthodes méprisables. C'est le cas de Light Yagami, dans le manga Death Note, qui choisit, au début, de noter que les noms de criminels dans son Carnet de la Mort, or, recherché par les forces de l'ordre, il va commettre de plus en plus d'erreurs. Dans le roman de Dan Brown, Inferno, l'antagoniste principal est un scientifique adepte du transhumanisme (mouvement qui cherche à améliorer les caractéristiques physiques et mentales des humains grâce à la science) qui comprend que le monde court à sa perte à cause de la surpopulation. Il est soupçonné d'avoir déposé un virus quelque part, qui n'attend qu'à être dispersé dans l'air pour supprimer la moitié de l'humanité. Or, à la fin du roman (et pas dans le film !), l'on apprend qu'il s'agit d'un virus qui n'a pour effet que de rendre stérile la moitié de la population mondiale. Pas de meurtres, un but politiquement défendable, cet homme est bien loin du méchant traditionnel.

Richmond Valentine (Samuel L. Jackson) dans le film Kingsman est bien plus radical. Écologiste convaincu, il réalise que les hommes ne sont pas prêts à faire des sacrifices pour prévenir le réchauffement climatique. Il décide alors de pousser la population mondiale à s'entre-tuer pendant qu'il met à l'abri les grands de ce monde. Attention, toutefois, à ne pas rater la construction de son antagoniste en n'en faisant qu'un personnage qui n'a que des excuses, comme les méchants dans Once Upon A Time, qui finissent tous par changer de camp, ou Maléfique (Angelina Jolie) qui perd tout son charisme dans la fade adaptation cinématographique de Disney.

La Némésis

Toujours dans cette recherche de la complexité, des auteurs ont imaginé que certains ennemis jurés pourraient s'opposer en tous points, tout en étant extrêmement proches. Explications. Au-delà du sempiternel « double maléfique », certains ennemis jurés sont appelés des Némésis, en référence à la déesse grecque de la colère, de la vengeance et, ce qui nous intéresse le plus, de l'équilibre. Parce que c'est de cela qu'il s'agit ici : des ennemis qui ne se battent pas dans le même camp mais se complètent ou se ressemblent. Dark Vador et Luke ont le même sang, ils ont le même parcours et les mêmes choix s'offrent à eux. Sauf que Luke demeurera du côté du Bien quand Vador embrassera le Mal. Le Professeur Moriarty pourrait user de son intelligence pour résoudre des enquêtes, comme Sherlock Holmes, mais il préfère s'en servir pour commettre des méfaits. Dans la saga cinématographique Matrix, l'Agent Smith, comme Néo, est un pur produit de la Matrice. Cependant, Néo décide de s'en émanciper en rejoignant la résistance de Zion, tandis que Smith demeure dans le programme et apprend à le maîtriser, à le contrôler. Il est intéressant de remarquer que Néo doit se sacrifier, à la fin du troisième opus, pour que Smith puisse être effacé.

Peter Pan et le Capitaine Crochet, issus de l'œuvre de J. M. Barrie sont un autre exemple intéressant. L'un enfant, l'autre adulte, tous deux craignent une chose : le temps. Peter a refusé de grandir mais Crochet, adulte d'un âge avancé, sent approcher la fin. Le Tic-Tac du crocodile représente bien cet aspect. Mais ce n'est pas leur seul point commun. Si le Capitaine a pour habitude d'exécuter ses hommes, Peter, lui aussi, se débarrasse littéralement des Enfants Perdus qui grandissent. Le monde change autour d'eux, les gens viennent et partent, mais eux demeurent. Tous deux sont incapables d'éprouver de l'amour. C'est la raison pour laquelle, à la mort de Crochet, Peter finit par le remplacer, incapable de vivre sans son vieil ennemi.

Un autre exemple de ce type est explicite : il s'agit de la relation entre Batman et le Joker. L'un est froid, l'autre fou à lier, l'un vêtu de noir, l'autre en costume coloré, et certains fans vont jusqu'à affirmer que tous deux sont des psychopathes, à leur manière. Le film de Tim Burton (1989) va même jusqu'à montrer un Joker et Batman liés jusque dans leur création. En effet, Jack Napier tue les parents de Bruce Wayne dans une ruelle, poussant l'enfant à devenir le Batman. Batman qui, des années plus tard, poussera accidentellement Napier dans une cuve d'acide. Défiguré, devenu fou, il devient le Joker. Franck Miller, lui, développera davantage cette relation complexe dans The Dark Knight Returns, un comics dans lequel il montre un Joker catatonique parce que son pire ennemi a cessé son activité de justicier. Enfin, dans le jeu vidéo Batman : Arkham Knight, leur relation est poussée à son paroxysme puisque, même mort, le Joker continue de hanter Batman qui, peu à peu, risque de se transformer en sa Némésis.

Les antagonistes ont beau adopter des caractéristiques physiques, morales et mentales différentes, leur rôle est crucial dans une fiction. Le fait qu'on ne puisse se contenter d'une seule définition, d'un seul aspect du « méchant », rend ce type de personnages extrêmement intéressant que l'on soit auteur, scénariste, spectateur ou lecteur.

 

2 commentaires

  1. Bouya
    Le 13 décembre 2016 à 22:59

    Très bon article. :)

  2. Assra
    Le 13 décembre 2016 à 23:19

    Merci Bouya

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