Le 7 mars prochain sort NieR Automata, l'occasion de revenir sur la carrière de Tarô Yoko et de comprendre son univers si particulier...
En l'espace de quelques années, le nom de Tarô Yoko est devenu bien connu chez les amateurs de RPG. Le bonhomme s'est fait connaître au début des années 2000 avec son premier grand titre pour lequel il a officié comme directeur : Drakengard. Edité par Square-Enix, le jeu bénéficie même d'une localisation en français. Si le jeu est marqué par des défauts, comme son gameplay ultra rigide, les joueurs plongent dans un univers noir sans pareil qui vont façonner le mythe de l'oeuvre.
Par la suite, Tarô Yoko se voit proposer de réaliser la suite de son jeu culte mais ce dernier ne sera que superviseur, trop occupé à travailler sur son prochain projet : NieR. Le jeu est un échec commercial alors que les critiques reconnaissent des qualités exceptionnelles au titre, comme son scénario, son univers, mais aussi sa bande originale. Et malgré l'échec de Drakengard 3, Tarô Yoko continue de faire vivre son univers avec NieR Automata. Retour sur une saga qui vous marquera. À jamais.
Naissance d'un mythe
En cette année 2003, les fans de Final Fantasy découvrent, dépités, la suite de Final Fantasy X qui donne envie de se taper la tête contre un mur. Et puis, ils découvrent, choqués, une nouvelle production de Square-Enix sur Playstation 2 : Drakengard. Ce RPG aux allures de Beat'em'all à la Dynasty Warriors nous emmène dans un monde de dark fantasy où le héros est en guerre contre l'Empire. Un classique du RPG en somme. Caim, c'est son nom, est un prince de 24 ans dont le pays a été détruit par l'Empire et dont les parents ont été tués par un dragon noir. Pour couronner le tout, sa sœur Furiae a été choisie pour être la Déesse du sceau qui maintient le monde loin du chaos. Elle est la cible de l’Empire qui manifestement, souhaite la destruction du monde.
Alors que Caim est mortellement blessé durant une bataille, il découvre, dans la cour du Bastion de la déesse, un dragon rouge agonisant. Les deux personnages n'éprouvent que haine : Caim contre les dragons et le dragon rouge contre les humains. Et pourtant, au bord de la mort, ils décident de passer un pacte. Ce dernier leur donne une force incommensurable mais le prix à payer est intraitable : ils sont liés par la vie, si l'un meurt, l'autre aussi. Enfin, Caim sacrifie sa voix pour la réalisation de son pacte. On se retrouve donc avec un héros muet pour le reste de l'aventure.
Ce qui semble un faible prix à payer est en fait un lourd tribu pour Caim. Il ne peut désormais plus crier sa vengeance et son épée devient son seul outil de communication pour le reste de l'aventure. Puisque c’est bien connu, l’action avant la réflexion. Heureusement, il peut communiquer par télépathie avec le dragon rouge qui est donc le détenteur des pensées du jeune homme. Petit à petit, une relation exceptionnelle se crée entre les deux protagonistes. À la vie et à la mort.
L'univers impitoyable de Drakengard
Drakengard est loin d'être un RPG conventionnel. La violence déchaînée de Caim se ressent à l'écran où notre héros laisse des mares de sang. Ayant perdu son royaume et sa famille, rien ne semble retenir sa rage démesurée à l'encontre des soldats de l'Empire. Mais pas seulement. Quiconque se met sur sa route se retrouve en charpie. Le dragon rouge tente d'ailleurs, du mieux qu'il le peut, de freiner la folie meurtrière de Caim.
Quelques compagnons rejoignent Caim dans sa lutte : Leonard, un prêtre aveugle qui a passé un pacte avec une fée, Arioch, une elfe qui a sacrifié sa fécondité pour passer un pacte avec deux esprits et enfin Seere, un enfant, qui suite avec un pacte avec un golem, voit son horloge biologique arrêtée à jamais. Tout ce petit monde se retrouve embarqué dans le sauvetage du monde. Pire encore, Leonard a vu sa famille massacrée pendant que ce dernier profitait de l'innocence d'un enfant dans la forêt. Quant à Arioch, traumatisée par le massacre de ses propres petits, elle ne veut se nourrir que de chair humaine, et particulièrement celle d'enfants....
Une suite en demi-teinte
Fort du succès critique de Drakengard, Square-Enix engage une suite du jeu qui déboule sur Playstation 2 en 2005. Tarô Yoko n'est crédité qu'en tant que directeur vidéo sur le jeu et non plus comme scénariste et réalisateur. Autant dire que le jeu est beaucoup moins noir que son grand frère, notamment son héros, Nowe, est beaucoup plus cliché au niveau de son caractère et de son histoire
Drakengard 2 prend place après la FIN A de Drakengard, le jeu en possédant 5 différentes. Après que le dragon rouge soit devenu la déesse du sceau, 18 années ont passé et l'Union a retrouvé une stabilité politique… Pour autant, Nowe, accompagné du dragon Legna sont amenés assez vite à défendre les districts protégeant le sceau et à affronter un redoutable individu bien décidé à faire sauter la paix pour sauver son ancien partenaire...
Si le scénario de Drakengard 2 brille par sa solidité, la patte de Tarô Yoko manque terriblement avec des personnages moins marqués psychologiquement et une grosse prise de risques avec une extrapolation de l'univers que notre homme semble renier. Pour autant le jeu existe.
L'OVNI NieR
C'est 5 années plus tard que Tarô Yoko fera reparler de lui avec un nouveau projet : NieR. Au Japon le jeu se décline sous deux versions : NieR Gestalt et NieR Replicant. C'est la première que nous verrons en occident, simplement titrée NieR. Elle nous place dans la peau d'un père de famille, NieR, faisant tout son possible pour sauver Yonah, son enfant, là où Replicant nous propose d'incarner le grand-frère de cette dernière.
À sa sortie, NieR divise la critique par son parti-pris graphique très inégal et techniquement loin d'être à la hauteur par rapport aux jeux sortant sur PS3 et Xbox 360. Le jeu sort d'ailleurs sur les deux consoles chez nous alors qu'au Japon Gestalt est édité sur Xbox 360 et Replicant sur PS3.
Le scénario nous raconte la quête de NieR dans un monde post-apocalyptique où l'humanité est progressivement décimée à cause d'un virus mortel appelé la nécrose runique. Accompagné d'un grimoire parlant répondant au nom de Wess, Nier s'engage dans un voyage durant lequel il ira à la rencontre de sa destinée ainsi que de la vérité sur le déclin de son monde.
Confirmation d'un talent inné pour la narration
Malgré son incroyable scénario, ses personnages profonds et sa bande sonore exceptionnelle, NieR est un échec commercial. Pourtant, assez vite, le jeu gagne en hype sur Internet et les fans de Drakengard ne font que louer le renouveau de la saga dans un univers futuriste, là où le jeu original se plaçait dans un monde médiéval.
Au delà de la technique datée, NieR plonge le joueur dans un univers violent, sanglant et malsain mais aussi dans un scénario incroyable et émouvant. Les compagnons de Nier ne sont pas en reste puisque Wess, Kainé et Emil sont tout aussi marquants que ceux de Drakengard. D'ailleurs, après Seere, cet enfant de 6 ans qu'on voyait tuer avec son golem dans Drakengard, on retrouve en Emil l'innocence foudroyée par la violence et l'horreur que chérit Tarô Yoko.
NieR est considéré par son auteur comme la véritable suite de Drakengard, prenant acte suite à la FIN E du jeu où Caim et le dragon rouge franchissent une faille spatio-temporelle. Enfin, les armes que vous ramassez durant le jeu sont toutes celles de Caim qui, a l’obtention, affichent un historique racontant leurs origines.
L'échec Drakengard 3
Alors que NieR se construisait petit à petit une aura de jeu culte chez les joueurs, Tarô Yoko rempile pour un nouveau Drakengard. Le bonhomme oublie sciemment Drakengard 2 et se décide à réaliser une préquelle à son premier projet. Drakengard 3 sort en 2013 sur une PS3 en fin de vie. Se déroulant une centaine d'années avant le premier Drakengard, on y suit Zero et son dragon Mikhail dans leur lutte contre les 5 sœurs de la protagoniste.
Le jeu est à sa sortie un véritable échec tant critique que public. Les graphismes, en dehors de la cinématique d'introduction sont une catastrophe. L'ambiance est elle aussi décriée, par un ton beaucoup plus caustique et l’humour noir qui font criser de nombreux joueurs. Exit l'ambiance malsaine et noire du premier Drakengard pour un essai scénaristique qui déçoit plus qu'il ne séduit.
Derrière la catastrophe, un univers magistral
Pourtant, si le jeu reçoit des critiques très négatives, force est de constater que le scénario est maîtrisé de bout en bout, apportant d'ailleurs de nombreuses réponses aux questions qui restaient en suspens dans Drakengard. Si les personnages séduisent beaucoup moins, ils restent marquants par leur caractère et on retrouve en Dito l'habituel enfant que Tarô Yoko affectionne à placer sans son œuvre. En bien plus dégénéré.
On peut aussi reconnaître en Zero une protagoniste badass qui démolit absolument tout sur son passage et ne se fait marcher sur les pieds par absolument personne. Tarô Yoko sait habilement construire des personnages barrés mais forts, capables de déplacer des montagnes pour leurs convictions. Mais surtout, aucun de ses personnages n’est sain et possède à chaque fois un caractère complexe et des évolutions atypiques dans les J-RPG.
La poursuite d'un rêve
Prévu le 23 février au Japon et le 7 mars dans le reste du monde, NieR Automata se déroule après la FIN D de NieR et prend place plusieurs centaines d'années après les évènements du premier jeu. Il n'est donc pas nécessaire d'avoir fait NieR pour y jouer, Tarô Yoko faisant en sorte que chaque jeu puisse être joué indépendamment des autres.
La démo, qui est disponible sur le Playstation Store depuis le 22 décembre, nous présente deux androïdes, 2B et 9S durant une mission sur Terre. Le reste de l'humanité l'a quittée pour aller dans l'espace et tente, par l'envoi de combattants androïdes, de reprendre celle-ci. La Terre est en effet ravagée par des machines venues d'un autre monde. Alors que la guerre fait rage, nos héros devront lever le mystère sur l'origine de ce monde…
Le buzz autour d’un jeu encore mystérieux
À l’inverse de Final Fantasy XV qui a eu une campagne marketing très soutenue, au point qu’on connaissait presque l’intégralité du jeu avant sa sortie, NieR Automata eu une communication plus discrète. La hype autour du jeu a monté progressivement grâce à la fanbase de la saga et une communication plus élaborée, comme par exemple un concert le 16 avril 2016 où le public a découvert plusieurs pistes de la bande sonore du jeu.
Tarô Yoko a également opté pour une communication très japoniaise avec la publication d’une vidéo sur youtube où il n’hésite pas à troller son propre jeu. Sur Twitter il a également demandé, de manière humoristique de récupérer les fanarts de 2B et de sa culotte. En effet, dans le jeu, l’héroïne repousse la caméra quand le joueur essaie de la placer sous sa jupe.
Clairement axé science-fiction et post-apocalyptique, NieR Automata présente une direction artistique formidable, servie par une bande sonore qui promet d'être magnifique. Les fans attendent au tournant le jeu qui devra relever le pari lourd de devenir une légende, comme Drakengard et NieR.
Malgré les échecs, Tarô Yoko continue de poursuivre sa saga aux thèmes noirs et a su se constituer une solide fanbase. On espère que NieR Automata sera la consécration pour lui.
Deathmes
Le 27 janvier 2017 à 19:17Merci pour ce récap, jusque là je ne savais pas trop à quoi m'en tenir niveau chronologie et quel épisode faire en priorité. J'étais assez peu intéressé par le jeu à l'origine, mais vu qu'il va sortir sur PC, plus Platinum games, ça peut valoir le détour. Et qui sait, peut-être que cela se révélera être un ZoE bis, une oeuvre méconnue, avec son lot de défaut plus ou moins lourds, mais reste des intense et prenante auprès des initiés. Y a plus qu'à faire les bacs d'occaz. :D
Captain Raziel
Le 30 janvier 2017 à 12:58J'ai beaucoup aimé ! Moi aussi j'avais du mal à me repérer dans cet univers Drakengard/NieR car sachant le tout lié, intiment. Le comble est que tu m'as essentiellement donné envie de jouer à Drakengard 1. En effet, j'ai tenté NieR et après quelques heurs de jeux, je me suis rendu compte que je ne m'amusais juste pas. Quand à Automata, comme dis sur mon Tumblr, je ressens trop la patte Platinium Games donc je veux d'abord avoir un retour sur l'histoire.
Elesia
Le 31 janvier 2017 à 17:08Merci pour vos retours ! @Deathmes : Concernant Drakengard et NieR, je te conseille de les faire car ce sont, comme tu le dis, de vrais OVNI avec des ambiances très particulières ! Bon par contre, le gameplay de Drakengard 1 c'est pas ça :p Mais si tu as aimé Zone of the enders, je pense que ces jeux-là peuvent te plaire. @Captain Raziel : Merci copain du collectif :p . Effectivement, ça se sent à quel point j'adore Drakengard 1 qui est juste culte. Mais comme dit juste plus haut, faut s'accrocher pour le gameplay assez lourd. Et dommage pour NieR, je te conseillerai de persévérer un peu :) Et pour Automata on verra mais ça sent quand même bon. J'ai tellement hâte d'y jouer :D
Nedry
Le 07 février 2017 à 23:46Merci pour cet article ô combien instructif, je dois avouer que le jeu (Nier Automata) m'a d'abord intéressé car Platinum Games est au manette (je suis un très gros fan) et après avoir terminé la démo une quinzaine de fois, je peux dire que je l'attends énormément. N'ayant pas touché aux Drakengard et à peine aperçu Nier ton article m'a donner envie de m'y intéressé. Ne reste plus qu'à trouver le temps. ^^
Elesia
Le 09 février 2017 à 14:08@Nedry : merci de ton retour ! Je suis tellement contente de donner envie aux gens de découvrir Drakengard et NieR car leurs échecs sont pour moins injustifiables T_T Et au moins avec ces jeux-là on pourra pas dire que les J-RPG c'est tout le temps niais :p
Dreadfox
Le 12 mars 2017 à 18:39C'est vraiment cool de faire un article sur Yoko Taro ! Ce mec est un génie ! (y'a qu'à voir la façon dont il vend les T-shirts de Nier:Automata XD) Le premier NieR était un petit bijou. Graphismes à la ramasse et gameplay qui ne cassait pas trop patte à un canard (même si divertissant), mais bordel quel claque ! Le scénar, les persos, les changements de genre et LA MUSIQUE, tout ça était parfait. Encore aujourd'hui c'est un de mes jeux préférés. Mais il était passé inaperçu, les critiques presses ne l'avaient pas vraiment soutenus plus que ça. Et aujourd'hui NieR:Automata sort, et c'est la consécration ! L'étoile filante discrète s'est muée en une aurore boréale que l'on ne peut plus ne pas voir. Il obtient le 9/10 partout ! Enfin les critiques comprennent tout ce qu'on peut tirer de cette saga (espérons que les ventes feront de même). C'est NieR qui prend sa revanche, et les critiques de déclarer (un peu de manière hypocrite sans doute) que c'était un petit chef d'oeuvre. Et c'est beau !
Dreadfox
Le 12 mars 2017 à 18:43C'est un rêve qui se réalise X,) La consécration serait que Mass Effect:Andromeda se prenne une PLS de l'espace en comparant ses notes à celle de NieR:Automata XD (je n'ai rien contre Andromeda et j'espère qu'il sera bon, mais ça me ferait tellement plaisir de vivre dans un monde où NieR aurait réussi à le surpasser^^)
ragnar0k
Le 14 décembre 2017 à 10:13... l'année 2017 se termine ... avec elle son lot d'émotion, Nier Automata a obtenu la récompense de la meilleur bande son au Games Awards 2017 et à mon goût méritait bien plus encore ! Scénario magique et transcendant, univers incroyable et beau, personnages charismatique ce jeu est une vrai pépite, un vrai bijoux ! Pour moi le meilleur jeu de l'année, et mon nouvea coup d'coeur vidéoludique ! Bravo au très grand Tarô Yoko, vivement la prochaine expérience du genre !