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Sélection officielle Cannes 2015 : connais-tu ces réalisateurs ?

Alors que l'ouverture de l'édition 2015 du Festival de Cannes se rapproche, penchons-nous sur la liste des films en compétition officielle. Vous allez voir que sur 19 réalisateurs sélectionnés, seuls 3 ne sont pas liés au Festival. 

Nul besoin de se sentir inculte, la cuvée 2015 de la sélection officielle du Festival de Cannes est particulièrement avare en réalisateurs médiatiques, français exceptés. Rares sont les cinéphiles connaissant tous ces noms, et encore moins ont vu l'intégralité de leur filmographie. Toutefois, en analysant le parcours de chacun, on découvre qu'ils ont presque tous une histoire intime avec le festival.

LA FRANCE FORTE

En 2014, le public français a plébiscité autant de films français que de films américains dans les salles de cinéma. C'est un privilège rare pour notre industrie nationale, conservé à coup de subventions, obligations de diffuser un quota de film français mais aussi et surtout grâce à l'incroyable vivier d'artistes français. Que l'on aime ou pas le cinéma gaulois, on ne peut nier sa place sur l'échiquier mondiale après les ogres américains et indiens. Voir le Festival de Cannes sélectionner dans sa catégorie principale ¼ de films locaux n'est donc pas du chauvinisme.

Le chef de file de la délégation française sera cette année Jacques Audiard. Fils du scénariste culte, Jacques s'est fait un nom et a mérité sa carte de membre du club cannois avec des films comme De Battre Mon Coeur s'est Arrêté (2005), De Rouille et D'Os (2012) et surtout Un Prophète (2009) qui a obtenu le Grand Prix du Jury. C'est donc un réalisateur déjà primé à Cannes qui espère enfin conquérir la Palme d'Or en présentant Dheepan, un film sur l'immigration. Audiard va cependant concourir aux côtés de Maïwenn qui a elle aussi construit sa légitimité dans la dernière décennie avec Le Bal des Actrices (2009) et Polisse (2011), lui aussi vainqueur du Grand Prix du Jury. Elle se présente au Festival avec la romance Mon Roi, un film porté par le duo de dandy Vincent Cassel et Louis Garrel. Pas encore récompensée à Cannes, mais déjà détentrice d'un César, c'est Valérie Donzelli. Elle s'est faite remarquée avec La Guerre est Déclarée en 2011, un succès critique qui a fait de bonnes entrées pour un sujet grave (la maladie d'un enfant). Après un retour à la normale avec Main dans la Main (2012), elle présente Marguerite et Julien, une histoire d'inceste sous le règne d'Henri IV.

Cela nous fait trois réalisateurs connus et reconnus à la carrière récente. Leur présence est tout sauf surprenante. Les deux artistes suivants sont sûrement très talentueux, mais ils sont en tout cas bien moins connus. D'un côté, Stéphane Brizé. Sa première réalisation remonte néanmoins à 1999 avec Le Bleu des Villes. Notons un César de la meilleure adaptation en 2010 pour Mademoiselle Chambon et cinq films en tout dans sa filmographie. Le voici sélectionné avec La Loi du Marché, une œuvre sociale portée par le toujours excellent Vincent Lindon. Les amateurs de Ken Loach sont intrigués. De l'autre côté, Guillaume Nicloux, romancier prolifique (neuf œuvres), il est aussi un réalisateur régulier avec neuf films mis en scène depuis 1990. Valley of Love a été sélectionné probablement pour le duo Gérard Depardieu/Isabelle Huppert, en attendant bien sûr de connaître la qualité du film. Il est question d'un couple répondant à un rendez-vous de leur fils qui vient de se suicider.

Premier constat : tous ces films sont des drames, pas des comédies grivoises. Deuxième constat : si le réalisateur n'est pas connu, ses acteurs le sont et ont une aura digne de Cannes. Dans le cas de Valérie Donzelli, on parle d'une artiste reconnue pour ses films engagées et déjà primés. Dernier constat : les seules femmes en compétition sont françaises ! Difficile d'en tirer une conclusion : est-ce que le cinéma français est moins sexiste que le reste du monde ? Seule Jane Campion, néo-zélandaise, a remporté la Palme d'Or en 67 éditions. Sans commentaires... 

LE RETOUR DES ITALIENS 

Les plus jeunes ne le savent pas, mais le cinéma italien a connu son heure de gloire des années 50 jusqu'à la fin des années 70. Ses artistes étaient mondialement reconnus dans des genres diverses. Depuis, il a médiatiquement disparu en France et ne refait surface que grâce à quelques films comme La Vie est Belle en 1998, ou le cinéma de Nanni Moretti. Palme d'Or en 2001 pour La Chambre du fils, ce réalisateur est depuis un habitué du Festival de Cannes : Le Caïman (2006), Habemus Papam (2011) et cette année Mia Madre. L'histoire d'une réalisatrice qui cherche à boucler son film alors que sa famille va mal. 

Outre Moretti, deux réalisateurs italiens plus jeunes sont déjà repartis de Cannes avec une récompense. Paolo Sorrentino a fait sensation dès 2008 avec Il Divo pour lequel il remporte le Prix du Jury. This Must Be The Place (2011) est lui aussi sélectionné, tout comme La Grande Bellezza (2013) qui obtient carrément l'Oscar du meilleur film en langue étrangère. Avec Youth (aussi appelé La Giovinezza), il réunit un casting de fous furieux : Michael Caine, Harvey Keitel, Rachel Weisz, Jane Fonda, Paul Dano... C'est pas mal du tout, mais son compatriote Matteo Garrone a fait encore mieux : choppé deux fois de suite le Grand Prix du Jury ! Avec Gamorra (2008, film à sensation sur la mafia) et Reality (2012), il rejoint un club très fermé composé d'Andreï Tarkovski, Bruno Dumont et Nuri Bilge Ceylan qui ont eux aussi obtenu deux fois cette récompense. Espérons pour lui qu'avec Tales of Tales (aussi appelé Il racconto dei racconti), il obtienne enfin la Palme d'Or. Bon, je ne suis pas très objectif, le synopsis et la bande annonce me faisant méchamment saliver : «Voici l'histoire étrange et incroyable qui se déroule à une époque baroque et fantastique où se croisent les destins d'un roi fornicateur et libertin, d'un autre roi captivé par animal étrange, d'une reine obsédée par son désir d'enfant. Sorciers, fées, monstres, ogres, courtisans et saltimbanques sont les protagonistes de ce conte. »  Vincent Cassel, Salma Hayek et John C. Reilly sont à l'affiche. 

Les italiens sont donc fièrement représentés par des habitués du Festival qui ont déjà obtenus des récompenses. Ils visent tous la Palme D'Or et le comité reste fidèle au cinéma de notre voisin. C'est la première fois depuis 1994 qu'autant de réalisateurs transalpins sont en lice pour le titre suprême, déjà rapporté en Italie dix fois, soit le plus grand nombre pour un pays depuis la création du Festival. 

DU NORD AU SUD DE L'EUROPE

Avant de quitter le continent européen, n'oublions pas quatre réalisateurs qui vont fièrement défendre leurs chances pour (à ma connaissance) leur première participation dans cette sélection officielle. Ce n'est toutefois pas leur première apparition sur la Croisette (vous l'avez compris, c'est le thème de cet article). Commençons par le grec Yorgos Lanthimos. En 2009, il a obtenu le prix Un Certain Regard, une autre sélection du Festival de Cannes. Après Alps (2011) qui a obtenu le Prix du Scénario à la Mostra de Venise, voici The Lobster. Porté par la très très médiatique Léa Seydoux mais aussi Rachel Weisz et John C. Reilley (déjà présent chacun pour un autre film) ainsi que Colin Farrell, ce film est une dystopie au synopsis intriguant : «Dans un avenir proche et dystopique, des personnes ordinaires sont arrêtées et enfermées dans un hôtel glauque où ils doivent trouver un partenaire en moins de 45 jours, faute de quoi ils se voient transformés en animal. Mais un homme refuse de se plier à cette folie et décide de fuir pour rejoindre les rangs d'un groupe de résistants. »  

Remontons maintenant un peu vers le nord de l'Europe en passant par la Hongrie. Le réalisateur Laszlo Nemes avait jusqu'à maintenant uniquement mis en scène des court-métrages. Il semble qu'il ait décroché en 2011 une bourse de la Cinéfondation. Or cette fondation est encadrée par le Festival de Cannes. Le sujet de cette bourse ? Le premier film de Laszlo, qui est cette année sélectionné à Cannes. De l'argent bien investi ! Avec Le Fils de Saul, on plonge dans l'enfer des fours crématoires de Auschwitz. Restons dans les films historiques en se déplaçant au Royaume-Uni avec Justin Kurzel. Il nous propose une relecture de Macbeth portée par Michael Fassbender et Marion Cotillard. Ce réalisateur n'est pourtant pas un inconnu du Festival puisqu'il a déjà obtenu la mention spéciale du président du jury de la Semaine de la critique en 2011 pour les Crimes de Snowtown. Enfin, dernier européen en lice : Joachim Trier. Ce norvégien dirige entre autres Isabelle Huppert (deuxième film sélectionné pour elle) et Jesse Eisenberg dans Louder Than Bombs. Son précédent film, Oslo 31 Août, avait concouru en 2011 dans la sélection Un Certain Regard. 

LA TRINITE ASIATIQUE 

Taïwan, Chine et Japon. Voici les trois pays représentés cette année dans la sélection officielle. On aurait été moins surpris de voir des œuvres hong-kongaises ou sud-coréennes, plus réputées chez nous, mais il s'agit quand même de trois cinémas importants dans cette partie du monde. Et si vous pensez que le Taïwanais est le moins légitime, vous vous trompez lourdement. Hou Hsia-hsien, c'est six sélections à Cannes et un Prix du Jury en 1993 pour Le Maître de Marionnettes ! C'est un modèle pour un grand nombre de réalisateurs chinois et un artiste reconnu par les journalistes et réalisateurs occidentaux. Ce n'est pas le cas du public qui attend sûrement de le voir remporter une Palme d'Or pour enfin se pencher sur sa filmographie. Avec The Assassin, il apporte un film d'arts martiaux qui a malheureusement peu de chance de décrocher le titre. 

Autre île (ou îles) bien plus grosse, le Japon. Hirokazu Kore-eda a fait sensation en 2013 avec Tel père, tel fils. Nominé un peut partout à travers le monde, ce film a remporté le Prix du Jury a Cannes et semble obséder depuis Steven Spielberg qui cherche à faire un remake. Le réalisateur propose cette année son dixième film, Notre Petite Soeur, tiré d'un manga (Kamakura Diary). Troisième et dernier réalisateur asiatique, le chinois Jia Zhangke. Le cinéma chinois est à la mode ces dernières années, sur fond de drames sociétaux bien loin des blockbusters d'arts-martiaux un peu cheap. Le précédent film de Jia, Touch of Sin (2013), a obtenu le prix du scénario à Cannes. Il se présente cette année avec Mountains May Depart, une romance prolétaire retraçant la vie d'une femme qui deviendra mère de famille.  

LES SURVIVANTS AMERICAINS 

Finissons ce tour d'horizon des réalisateurs par la Team America. Ce quatuor est composé d'une méga-star, d'une étoile montante et deux réalisateurs déjà primés. À tout seigneur tout honneur : Gus Van Sant. Palme d'Or en 2003 avec Elephant, il est depuis régulièrement sélectionné, soit en compétition officielle (Last Days, Paranoid Park), soit dans les sélections secondaires (Mala Noche, Restless). Il est de retour avec Sea of Trees, l'histoire d'un homme venu se suicider mais qui découvre un homme blessé. Avec Matthew McConaughey, Naomi Watts et Ken Watanabe, c'est le film glamour de Cannes. 

L'étoile montante, c'est Denis Villeneuve. Ce canadien (bon j'ai triché, j'ai choisit le terme américain au sens large....) a explosé en 2013 avec ses deux films Prisoners et Enemy. C'est pourtant dès 2009 qu'il se fait remarqué avec Polytechnique présenté à la Quinzaine des Réalisateurs. Il va tenter de remporter la Palme d'Or grâce à Sicario, un thriller situé à la frontière mexicaine où l'on retrouve Emily Blunt, Josh Brolin et Benicio del Toro. Terminons avec Todd Haynes et Michel Franco. Le premier a obtenu en 1998 pour Velvet Goldmine le prix de la meilleure contribution artistique. Il présente cette année Carol, un road-movie entre Cate Blanchett et Rooney Mara qui se déroule dans l'Amérique de 1952. Quant à Michel Franco, il a décroché en 2012 le Prix Un Certain Regard avec Despues de Lucia. Il tente cette fois sa chance dans la sélection officielle avec Chronic, un drame porté par Tim Roth

Vous l'avez compris, la sélection officielle est un cercle très fermé qui s'intègre en majorité grâce à une participation à des multiples sélections parallèles du Festival (qui regorgent de films intrigants). Qui va remporté la Palme d'Or cette année ? Difficile de donner un pronostique. Seuls huit réalisateurs ont remportés deux Palmes. Dans la sélection 2015, Nanni Moretti et Gus Van Sant sont déjà lauréats de ce prix si prestigieux. Allez, je me mouille et je mise sur le japonais Hirokazu Kore-eda, même si Gus Van Sant a de sérieux atouts à faire valoir. 

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