Il y a encore 10 ans, la carrière de Liam Neeson forçait le respect. Depuis, l'acteur enchaîne les rôles foireux et s'enferme dans un personnage.
Qu'il est loin le temps où on évoquait sans honte l'immense talent de Liam Neeson. Né en 1952 en Irlande Nord, il abandonne en 1979 une carrière de professeur pour devenir acteur. Avec sa voix grave, sa gueule charismatique et des rôles mémorables, Liam enchaîne pendant presque 20 ans les films cultes.
Il avait tout pour lui
Après des apparitions dans Excalibur et Le Bounty, Liam Neeson fait décoller sa carrière en jouant aux côtés de Robert De Niro et Jeremy Irons dans Mission (1986), Palme d'Or cette année là au Festival de Cannes, puis Suspect (1987). C'est avec Darkman (1990) qu'il prouve sa capacité à tenir le premier rôle. Fait notable, dans ce film de Sam Raimi (Evil Dead, Spider-Man), il incarne déjà un justicier qui s'attaque à la mafia....
Suite à Maris et Femmes (1992) de Woody Allen, Liam marque à jamais de son empreinte le cinéma grâce à La Liste de Schindler (1993), déchirante oeuvre de Steven Spielberg où l'acteur protège le maximum de déportés juifs, sans pouvoir en sauver assez comme il le remarque dans une poignante scène finale. Le film remporte 7 Oscars, mais pas Liam qui poursuit dans cette direction avec d'autres projets tout aussi engagés, notamment Rob Roy (1995) et Michael Collins (1996), des récits historiques sur des révolutionnaires écossais et irlandais.
Dès le nouveau millénaire, Liam Neeson se fait plus présent dans les blockbusters américains. Avec Star Wars (1999), il assume son âge et la supposée sagesse associée, joue les mentors et offre une scène de combat mémorable. Dans Gangs of New York (2002), il n'apparaît que dans le prélude mais irradie de sa présence l'histoire. Enfin, grâce à Love Actually (2003), il est reconnu de facto comme une star aux côtés d'un Hugh Grant ultra-populaire à l'époque.
L'acteur est ainsi à cette époque devenu une tête d'affiche courtisée par de nombreux producteurs. Il fait les bons choix et sait enfiler différents costumes, comme le montre si bien l'année 2005 où il apparaît dans trois films remarqués. Kingdom of Heaven, Dr Kinsey et Batman Begins, trois rôles diamétralement opposés. À 53 ans, Liam Neeson a déjà obtenu une nomination aux Oscars et a remporté 3 Golden Globes (La Liste de Schindler, Michael Collins et Dr Kinsey). Sa carrière est bien remplie et semble le mener tout droit au panthéon du cinéma.
Une série d'échecs fatals
Dix ans plus tard, le constat est amer. La décennie écoulée semble avoir écorné l'image de l'acteur, la faute aux choix douteux qu'il prend. Dans la catégorie films très médiatiques, L'Agence tous risques (2010), la doublette Le Choc des Titans (2010) et La Colère des Titans (2012), Battleship (2012) ou Albert à l'ouest (2014) sont des échecs. Le premier de cette liste n'est pas à la hauteur de l'oeuvre originelle et, malgré de savoureux moments, on sent bien que Neeson cabotine. Dans le dyptique (avorté) peplum, qui est un remake d'un film culte, on remarque un changement de direction artistique entre les deux opus destiné à sauver le film des critiques. Malheureusement, le personnage de Zeus reste caricatural.
Quant à l'adaptation d'un jeu de société, que dire si ce n'est que Neeson utilse avant tout son charisme et son image pour imposer un archétype, celui du père/commandant qui est témoin des exploits de son futur beau-fils. Certes, certains de ces films sont rentabilisés, mais ils ne sont clairement pas des succès et font plus rire à leurs dépends qu'épater. Que fait Neeson dans ces galères ? Besoin d'argent ? Faire plaisir à ses proches ? Envie de tourner dans des blockbusters ? Mystère...
L'acteur tourne à la même période dans d'autres productions beaucoup moins médiatisées et qui...ne fonctionnent pas. Chloé (2009) est une histoire d'infidélité, After Life (2009) explore la mort et Third Person (2013) est un nouveau film chorale. Il n'y a que The Grey (2012) qui s'en sort plutôt bien et c'est logique : le rôle est plus épais et colle bien plus à l'acteur, qui n'est pas passif comme dans les comédies à la con qu'il enchaîne. C'est ce que veut le public : voir Neeson prendre la situation en main et sauver tout le monde. Et ce que le public veut, Liam lui donne. Trop même.
Le piège Taken
Le film qui change tout, c'est Taken (2008), une production de l'écurie Luc Besson. Cela peut faire rigoler, mais c'est un vrai savoir-faire national et cette oeuvre cartonne dans le monde. Le réalisateur Pierre Morel livre une histoire nerveuse qui n'a rien à envier aux films d'action américains. Cette production n'a pas à rougir face aux précédents succès de l'acteur. Le problème, c'est qu'il va céder à la facilité et enchaîner avec Taken 2 (2012) et Taken 3 (2015). Au box office mondial, la suite fait mieux alors que le dernier opus stagne. En revanche, aux USA, c'est la stagnation dès le deuxième épisode et la chute des recettes pour le troisième.
Pourtant, l'acteur accepte rapidement plusieurs rôles similaires. Cela en devient caricatural, comme le sketch des Guignols sur le business de Luc Besson, avec le même scénario qui tourne en boucle. La preuve avec les synopsis. Taken : un ancien agent secret bute tous les gars qui ont kidnappé sa fille. Sans Identité (2011) : un gars est amnésique et bute tout le monde pour se souvenir de sa femme. Non-Stop (2014) : un flic dans un avion prêt à buter tout le monde pour sauver les passagers. Balade entre les tombes (2014) : un ancien flic bute les meurtriers de la femme d'un trafiquant de drogue. Enfin, Night Run (2015) : un ancien mafieux bute des flics corrompus.
Difficile pour la nouvelle génération d'identifier Liam Nesson à des rôles plus sérieux, plus dramatiques, plus historiques. Que sont devenus Schindler, Rob Roy ou Michael Collins ? On a conservé la lutte mais pas les idéaux. Et l'acteur de multiplier les caméo, comme en 2015 avec Ted 2 et Entourage. Entre temps, il fait une comédie romantique et semble abandonner toute ambition créative...
Espérons toutefois que le futur redonnera du lustre à l'image artistique d'un acteur formidable. Ses projets pour 2016 vont dans ce sens : Silence par Scorsese, Operation Chromite (un film coréen de guerre) et A Monster Calls, un truc de fantasy. Allez, c'est possible. Ah, merde, on vient d'apprendre que Liam Neeson va jouer dans The Commuter, un film du réalisateur de Non-Stop et Night Run. L'histoire d'un honnête businessman qui doit affronter une conspiration criminelle. Bon, Liam, va encore falloir buter quelques gars...
Liam Neeson a une carrière dense et bien fournie. Il ne faut pas oublier ses grands rôles au profit des derniers moins ambitieux. Qui sait, de nos jours, il a encore facilement 20 ans devant lui pour incaner de nouveaux personnages cultes et buter pleins de gars au passage !
Leodagan
Le 31 mars 2016 à 21:29Malheureusement vous n'évoquez pas dans votre article ce qui est surement à l'origine de sa déchéance : le décès de sa femme, Natasha Richardson en 2009. Lui même à évoqué sa carrière dans diverses interviews, disant qu'il avait noyé le chagrin de sa perte en s'abandonnant un maximum dans son travail, multipliant ainsi les mauvais films d'actions.
Farid
Le 01 avril 2016 à 14:44Merci Leodagan pour l'information ! Tout s'explique alors, ce qui est malheureux tant j'adore cet acteur. Je me doutais bien qu'il y avait eu un problème, mais n'était pas au courant de ce décès. Je vais corriger l'article dans ce sens. Merci !
Leodagan
Le 03 avril 2016 à 03:21Pas de problème ! Toujours un plaisir d'aider, surtout pour un site que j'apprécie énormément :D
Farid
Le 03 avril 2016 à 15:38Raaaah merci vous ne savez pas à quel point cela fait plaisir de lire un tel commentaire ! (sans que cela ne soit un pote ou un membre de la famille ;) )