Une série qui parle de relation de couple des temps modernes et de sexe réaliste ? C’est ce que nous promet Easy, la petite série originale Netflix, sortie en septembre dernier.
Easy, sortie le 22 septembre 2016 sur Netflix, est une petite série facile à voir, facile à enchaîner, facile à pitcher : 8 épisodes de 30 minutes chacun, 8 relations de couples, 8 moments de vie, qui nous font un petit patchwork sociologique sur quelles sont les différentes formes de couples et leurs problèmes aujourd’hui. Idéal pour passer une petite soirée pépère, non ? En tout cas moi c’était mon programme d’il y a quelques semaines et il faut qu’on en parle !
Mumblecore et Joe Swanberg
Easy se range dans la catégorie des fictions de genre mumblecore, si vous n’en avez pas beaucoup entendu parler, c’est normal, il s’agit d’un jargon un peu indie du cinéma festivalier. Pour faire simple : dans ce genre, le scénario existe, la réalisation, les personnages sont préalablement pensés, mais il n’y a pas ou peu de répliques prédéterminées, les dialogues sont improvisés. Le mumblecore est initialement un genre issu du cinéma indépendant américain qui s’intéresse à la réalité de la vie des jeunes adultes, souvent avec peu de budget, et qui va focaliser sur l’aspect très réaliste, avec cette idée que l’improvisation des dialogues permet de produire des scènes de vie plus « vraies ».
Plusieurs films et figures sont emblématiques du mumblecore, et souvent on retrouve les mêmes acteurs avec les mêmes réalisateurs pour faire perdurer cette petite mouvance. Joe Swanberg, le scénariste et producteur de la série Easy, est une figure importante du genre dans l’univers du cinéma indépendant. On le connaît notamment pour LOL (le film américain) sorti en 2006, Hannah Takes the Stairs, ou encore Drinking Buddies qui sont quelques uns des films mumblecore les plus connus. Cette fois-ci c’est au format série que Joe Swanberg teste le genre, et quoi de mieux qu’un petit format de plusieurs petites scénettes pour faire exploser son genre de prédilection ?! Les acteurs, en tout cas, semblent s’en donner à cœur joie !
Une flopée d’acteurs connus
Et parlons-en des acteurs, parce qu’Easy ne lésine pas de ce côté-là. Pour présenter ses personnages qui se veulent si représentatifs d’une certaine réalité : Elizabeth Reaser (Grey’s Anatomy, Twilight), Orlando Bloom (Le seigneur des anneaux, Pirates de Caraïbes) Dave Franco (21 Jump Street, Insaisissables), Aya Cash (You’re the worst) et plein d’autres font partie de l’aventure ! Et les découvrir, pour certains, dans des rôles assez inhabituels est un plaisir à voir.
Surtout que l’exercice de l’improvisation est quelque chose qui permet d’en stimuler quelques uns, ou de voir certaines failles chez d’autres. Ce qui conduit peut être à un certain déséquilibre entre les épisodes, mais honnêtement, je pense que ça vient plus du scénario de base que de la performance des acteurs, ainsi que du fait que les différentes conjectures de couples vont forcément toucher un public différent en fonction de ses préférences, sa propre situation, etc.
Une série contemporaine, avec différents thèmes abordés
Chaque épisode va présenter un couple différent, une tranche de vie de ces personnages et soulever une certaine problématique. Par exemple, le premier épisode, intitulé Mariés, deux enfants va évoquer la lassitude et le manque d’attirance dans un couple avec des enfants… et comment le regard des autres va influer sur eux ainsi que quelle part de faux semblants ça implique. Le deuxième : Cendrillon est végétalienne s'intéresse à une jeune fille qui va rencontrer et passer une nuit passionnée avec une fille végane. Elle va tomber en admiration avec elle et, pour lui plaire, va essayer de se conformer à ce qu’elle pense que l’autre aimerait qu’elle soit, en jouant quasiment un rôle. L’épisode 3, Une affaire de famille, parle de drogue et des relations entre familles qui vont de près ou de loin influer sur la vie du couple. L’épisode 4, Canapé-lit, va s'intéresser à la maternité et au décalage des gens en couple face à leurs amis qui ne sont pas dans le même état d’esprit. Dans l'épisode 5, Une histoire de vie, on suit une auteure de BD qui raconte aux travers de ses planches ses péripéties amoureuses...
On parle des couples actuels, on évoque des thématiques comme le véganisme, Tinder, ça parle de plan à trois, de lassitude, de maternité. Et on peut penser à un truc archi parlant, novateur, qui évoque la réalité d’aujourd’hui et c’est un peu le cas, c’est même vachement le cas et c’est bien, mais, selon moi, ça n’ose pas assez, ça reste un peu surfait. C’est peut être voulu, mais je m’attendais à plus parfois. Il me manquait ce côté original qui rend ce que l’on voit attachant. Comme ce que j’aime retrouver dans les films (avec les mêmes thématiques) avec Greta Gerwig (Francess Ha, Mistress America, Annah Take the stairs) par exemple. Même si ça reste intéressant à visionner.
Sexe et relations amoureuses : description des amours d’aujourd’hui
Easy parle essentiellement d’amour et plus précisément de relations amoureuses. On partage avec nous, avec ce léger soupçon de voyeurisme, des extraits de vie de ces couples, dans leur intimité, leurs phases de séduction, leurs phases de doute, de faiblesse, leurs moments de complicité, et de sexe aussi. Ce sont des moments qu’on ne peut pas inventer, qu’on ne peut pas feindre, qui se matérialisent dans la relation de couple et dans une certaine proximité et intimité. Et c’est ce côté-là qui nous positionne un peu en tant qu’intrus qui assistons à ce que nous ne sommes pas censés voir. Et c’est ça qui rend Easy aussi enrichissant.
Le côté décomplexé et l’intérêt de l’œuvre se situent dans la caméra et les prises de vues, celles-ci parfois tremblantes comme voulant se déplacer discrètement pendant les scènes d’intimité. Elle nous montre simplement, sans jugement, un instant. De ce fait, les épisodes ne se terminent jamais par un point net et précis et c’est ce qui nous permet, sans nous imposer une vision ou un thème à l’image, de continuer le travail dans notre imaginaire ou d’aller plus loin dans la réflexion de cet extrait ou tout simplement de s’arrêter là.
Réalisme et authenticité ?
Les images sont réelles, le mumblecore ajoute à ce côté intimiste, on nous montre les choses telles qu’elles sont. Ce n’est pas glamour, les formes sont naturelles, les poils sont visibles, les sous-vêtements sont en coton, les plaisirs sont rapides ou simulés, les dialogues sont souvent pauvres, même si certains sont percutants, comme tout contenu de réelles discussions.
Néanmoins, avec ces thématiques traitées en 30 minutes chrono, certaines personnalités sont excessivement stéréotypées et c’est le gros défaut de la série selon moi. Certes, le format court n’aide peut être pas à pénétrer dans la complexité des personnages. Le peu de dialogues et les situations jouées naturellement, couplés à une situation particulièrement pensée et écrite avec les caractéristiques des personnages, qui est assez succincte finalement, reposent totalement sur la profondeur que va apporter l’acteur dans la compréhension de son personnage. Mais ça ne suffit pas, il y a un certain manque de réalisme dans l’instant présenté car même s’il est est unique, il n’est pas pour autant toujours authentique.
Je m’explique : le moment ne nous suffit pas pour voir au-delà des simples critères de base des personnages, même avec le plus grand talent des acteurs, chose qui fonctionnerait très bien dans le format cinéma, mais dans ce format si court, on ne peut pas passer outre le côté « stéréotypé » des personnages. On est parfois même dans l’excès, car toute la situation est un stéréotype en elle-même. Je pense notamment à l’épisode 2 avec le personnage féminin qui est une lesbienne, bobo, écolo, végane, militante, et qui ne s’épile pas. En dehors de ça ? On ne voit pas grand-chose d’autre d’elle, même s’il est vrai qu’elle répond à une certaine réalité, c’était de mon point de vue too much, dans ce contexte, car elle n’était rien d’autre que ces “étiquettes”.
Au final, qu'est-ce qu'Easy ?
On nous la vendait comme un descendant de Sex and the city en plus réaliste, mais dans la relation et la complexité des personnages, ce dernier était, de mon point de vue, bien plus réaliste.
On nous vendait aussi Easy comme quelque chose de drôle qui parlait d’amour, du couple et de sa réalité. Pour le coup par contre ce n’est pas mensonger. La série nous parle de la réalité des différents couples et des problèmes qu’ils peuvent être amenés à rencontrer et en cela c’est frais, tant ces sujets sont universels et peuvent facilement pousser à l’autoréflexion.
Easy est une petite série qui nous permet de plonger dans des situations de vie uniques et intimes. C’est une vision de la société, des relations et des problèmes que les différents types de couples vivent au quotidien de nos jours. Elle est intéressante à regarder, enrichissante, assez divertissante, mais pêche un peu par son côté parfois trop stéréotypé des situations ou personnages présentés.