God Bless America. Oui, Dieu bénisse les États-Unis pour ce qu’ils sont : le premier producteur au monde de serial-killer et l'inventeur de success-story à tour de bras. Dwayne Johnson n’étant pas, du moins nous lui souhaitons, un serial-killer, il n’en est pas moins une figure emblématique du paysage cinématographique actuel outre-Atlantique. Retour sur le parcours d’une icône en devenir.
Fils de Wayde Douglas Johnson et d’Ata Maiva, Dwayne Johnson n’a pas eu une enfance comme vous et moi. Chez les Johnson, on est catcheur de père en fils. Papa est catcheur. Papi est catcheur. Mamie est catcheuse (oui, oui). Dwayne côtoie depuis sa plus tendre enfance les bastons, les rings et les projecteurs. Un genre d’enfant de la balle survitaminé qui, bouillonnant sur les bancs de la fac de Miami, se destine à une carrière dans le football américain. Y aurait-il mutinerie dans le camp des Johnson ? Pourtant, comme un cri de l’atavisme familial écrasant les aspirations séditieuses de l’ado en crise, le destin voudra qu’une blessure ne vienne mettre un terme à ces velléités de footballeur. Adieu NFL : le ring a été plus fort. Une fois son diplôme de criminologie en poche, il retourne auprès des siens pour apprendre le métier et se forger une réputation au cours de compétitions nationales. Un an plus tard, il signe à la WWF (Wrestling World Federation), l’équivalent de la 20th Century Fox pour les catcheurs. Le plus dur est de commencer…
En quelques années, le jeune catcheur se hisse, entre insolence et maitrise des codes, parmi les plus célèbres figures du catch de la fin des années 90. Il devient « The Rock » en hommage à son papounet (Rocky Johnson pour les connaisseurs), la Montagne « heel » pour être précis. En effet, il faut savoir que le catch divise ses catcheurs protagonistes en deux catégories dont la subtilité n’est pas le maître mot : les gentils sont appelés « Face » et les vilains, « Heel ». Entre les deux existent les « Tweeners » et les « Turn », les tourne-casaques pour la faire simple. Industrie tout ce qu’il y a de plus américaine, comment s’étonner d’y retrouver une logique manichéenne à souhait ? Le bien contre le mal ! La lumière contre les ténèbres ! George Bush contre Sadam Hussein !
Mais revenons à notre montagne... Si cette ascension peut sembler dérisoire à nos yeux européens, elle n’en demeure pas moins représentative de l’une des principales facettes de ce sport : le showtime. Autant les prouesses physiques du catch sont questionnables, autant les pérégrinations du géant pour atteindre le titre ultime valent le détour. C’est Amour, Gloire et Beauté au pays des slips moulants et des anabolisants : rivalité entre champions, intrigues intestines, alliances secrètes, trahison, coup bas...tout y est. Ajoutez à ça le slogan « Do You Smell What The Rock Is Cooking », des mimiques atypiques et une signature en forme de haussement de sourcils, vous avez « The Rock » : 1m93, 120 kg et une vingtaine de trophées à son actif.
Mais alors que le monde entre dans les années 2000, Dwayne "The Rock" Johnson entre dans une nouvelle ère : le cinéma. À la manière d’un Hulk Hogan flirtant avec le grand écran, The Rock se destine à une carrière dans l’industrie cinématographique en interprétant des rôles plus ou moins importants avant d’annoncer son départ de le WWE en 2003. Mais un Johnson ne quitte jamais vraiment le ring. Neuf ans plus tard, il remet ça, enfilant à nouveau son slip moulant à grand renfort de mises en scènes plus lourdes les unes que les autres. Sa dernière apparition date de janvier 2015. Or, cette période décisive pour Dwayne où, atteignant les sommets du monde du catch il décide d’y mettre un terme, mérite qu’on s’y attarde quelque peu.
Le ring et l’acteur
On a beau être aux États-Unis, au début des années 2000, lorsque pratiquement tout était censé être possible, il n’est pas simple pour un type comme Dwayne de réussir à se faire une place dans le monde du cinéma. Néanmoins, l’homme a du ressort et, profitant de la notoriété de sa masse musculaire, il décroche un rôle secondaire dans Le Retour de la Momie, deuxième volet de la franchise sorti en 2001, dans lequel il joue le Roi Scorpion. Ce qu’il y a d’intéressant avec ce premier film, c’est qu’il va finalement lui servir de passerelle entre son passé de catcheur et son ambition d’acteur. Tandis que le monde découvre son sourcil relevé dans son combat final contre le benêt Brendan Fraiser, il tourne le spin-off Le Roi Scorpion. Un premier rôle principal dans un film dispensable mais qui pose la pierre fondatrice de sa carrière dans le cinéma. Au fil de ses apparitions, il n’est plus The Rock, il redevient Dwayne Johnson. La suivante sera tout aussi décisive : Bienvenue dans la jungle. Tout en introduisant cet improbable duo d’acteurs (que l’on retrouvera d’ailleurs 3 ans plus tard à l’affiche d’un des films les plus barrés des années 2000 sur lequel nous reviendrons) formé par Dwayne et Sean William Scott aka Stifler, le film mène notre Dwayne vers des territoires cinématographiques mêlant action, comédie et bro’trips.
La chose n’est pas nouvelle, mais s’avère être un exercice plus ou moins délicat. En effet, nombreux sont ceux qui demeurent traumatisés par le rôle de Schwarzenneger dans Junior quand celui-ci atteignait l’équilibre parfait dans Last Action Hero à coups de répliques cultes du genre « comment comptes-tu claquer des doigts pour tes molosses une fois que je t’aurais bouffer les pouces des deux mains ? ». Mais Dwayne a appris la leçon de ses aînés et si ce n’est l’ignoble Maxi Papa (dont le synopsis tient miraculeusement dans le titre), il se cantonne à des rôles de gentil à gros bras vertueux dans des films de genre à tendance musclée. Faut-il voir là une manière d’enterrer son rôle de vilain catcheur Heel ? Rien n’est exclu…
La montagne qui marche (et vite)
L’histoire commune veut qu’au cours de ces mêmes années 2000, Dwayne n’ai enchainé que des films de seconde zone, des navets, comme Doom et Be Cool (film catastrophique avec entre autres, John Travolta, Uma Turman, Harvey Keithel et Vince Vaughn) ainsi que La Montagne Ensorcelée avant de finir par être miraculeusement intégré au casting de la rentable franchise Fast & Furious. Intégration brillamment orchestrée soit dit en passant, lui permettant de passer à la vitesse supérieure (sans jeux de mots). Mais voilà : l’histoire fut injuste avec Dwayne. Elle a oublié Southand Tales : un film sorti en 2006 de Richard Kelly (Donnie Darko, The Box, God Bless Americ) à l’étrangeté cinématographique exubérante. Exubérance visuelle avec des plans esthétiquement forts. Exubérance narrative avec un scénario d’apocalypse sur fond de stupidité humaine, de consommation énergétique débridée et de faille spatio-temporelle. Exubérance théâtrale avec (entre autres) Dwayne en boxeur terriblement débile, Sarah Michel Gerard en ex-actrice porno en quête de rédemption médiatique et Sean William Scott (à nouveau) en flic paumé au milieu d’hallucinations.
Un film réussi parce que tout ce qu’il y a de plus WTF, d’une sophistication et d’une complexité pouvant (presque) talonner Mulholland Drive et qui donne à la Montagne un rôle délicatement autobiographique et juste. Avec Southand Tales, Dwayne s’écarte avec autodérision de l’image simplette de l’ancien catcheur reconverti en acteur bodybuildé pour film d’action au scénario quasiment pornographique. Une autodérision qu’on retrouvera dans No Pain, No Gain de Michael Bay (Bad Boys, Armageddon, Transformers…) où l’homme interprète, aux côtés de Mark Wahlberg, un bodybuilder illuminé et assoiffé d’argent facile, avec une justesse notable. Mention spéciale pour cette scène où son personnage tente de faire disparaitre les traces d’un cadavre en les faisant cuire sur un barbecue en pleine zone résidentielle.
Des rôles à contre-courant des films dans lesquels il est attendu comme tête d’affiche immanquable, du type G.I Joe, Hercules, l’inspecteur Luke Hobbs dans Fast & Furious ou plus récemment dans San Andreas. Que dire sur ces films et sur le rôle qu’y tient Dwayne ? Rien de véritablement nouveau sur le plan cinématographique, ils n’innovent qu’en élevant le taux de testostérone et de répliques bon marché proportionnellement au budget effet spéciaux. Ils illustrent cependant la dernière marche franchie par notre goliath maori : le succès international, l’installant comme une figure incontournable du film d’action. Un processus lent, mais qui arrive aujourd’hui à son terme puisqu’en plus de laisser ses empreintes sur Hollywood Boulevard (instant people), il est apparu sur une série autour du football américain : Ballers.
Produite par Wahlberg, cette série de second plan et d’une utilité toute relative s’intéresse aux pérégrinations de footballeurs à la retraite, face à la cruelle réalité et aux affres abyssales des fins de mois difficiles. Une série honnête qui n’entend pas résoudre les grands mystères de l’existence ou apporter la paix en Syrie, et dont la cohérence repose uniquement sur notre bon Dwayne. Son rôle sur-mesure (celui d’une ancienne star du football américain) s’avère même un peu trop facile, un peu trop lisse, compte tenu de son potentiel en termes de décalage comique. Mais qu’importe… À moyen terme, on le retrouvera dans un huitième Fast & Furious. Enfin, à long terme, les fans ont été comblés d’apprendre qu’il campera le rôle de Shazam/Captain Marvel. Sortie prévue en Juillet 2018. Étrange qu’il ne soit pas encore apparu dans l’un des volets Expendables, non ?
Pur produit de l’industrie du spectacle américain, le Rock n’est peut-être pas le meilleur acteur qu’Hollywood possède actuellement. Néanmoins, Dwayne Johnson (car il est important désormais de démarquer sa double casquette) est peut-être le symbole de ce que l’Amérique sait faire le mieux : des acteurs hollywoodiens pleins de bonne volonté, capables de représenter à eux seuls un genre et de s’en démarquer avec une certaine dose d’humour. Une dose qui fait toute la différence, prouvant le capital sympathie et le talent d’un homme dont la carrière doit être suivie de près, histoire de ne pas passer (encore) à côté de l’histoire.
Farid
Le 11 octobre 2015 à 01:05Le parfait exemple de la puissance de l'entertainment au 21ème siècle. Ce gars est une marque à lui tout seul, et en prouvant sa versatilité, il s'est ouvert de nombreuses portes. Oui c'est parfois une caricature jouissive (comme dans Fast & Furious) mais dans Ballers, il a un rôle vraiment intéressant sans violence, où seul son jeu compte.
Pierr7ck
Le 13 octobre 2015 à 23:54IT DOESN'T MATTER WHY DWAYNE JOHNSON IS NOT JUST MUSCLE !!!!
PartyOver!
Le 17 octobre 2015 à 01:12J'aime beaucoup cet article et son humour par contre pour la petite info Johnson jouera le méchant, Black Adam, et pas le héros dans le film SHAZAM.
Farid
Le 17 octobre 2015 à 14:14Merci pour la précision PartyOver!
Lordo
Le 18 octobre 2016 à 23:02Il faut savoir qu'en plus de tout ça, il n'était pas apprécier lors de son premier passage à la WWE, souvent huer, les gens n'entrais pas dans son gimmick et c'est bien après que son talent à été reconnus et surtout lors de son second passage, bien trop arrogant durant le premier. Par contre j'ai tiquer sur une phrase "Autant les prouesses physiques du catch sont questionnables" alors là je suis pas d'accord, s'il y a bien une chose qui n'es pas questionnable dans le catch c'est justement les prouesses physique, les jeux d'acteurs et les storylines vaseuse ça par contre c'est discutable (et le port du slip saillant ... là aussi on se pose pas mal de question), mais quand on vois le nombre de star qui se retrouve en arret à cause d'un mauvais coup, du nombre d'opération etc, c'était quelque-chose de discutable dans les années 70-80 mais dans l'ère moderne on est clairement sur des athlètes. En tout cas vive Dwayne The Rock Johnson !
Farid
Le 18 octobre 2016 à 23:49C'est vrai que certains combats sont spectaculaires et nécessitent des capacités physiques et un entrainement hors norme. Sinon la saison 2 de Ballers était bonne, avec un Dwayne Johnson à fond dans le jeu d'acteur (il n'y a pas de cascades ou baston dans cette série). Il s'en sort bien, surtout son duo avec son collègue fou